Jolie plaque émaillée du Touring club de France située à Arras-sur-Rhône (photo: MV, août 2013).
Sainte-Colombe se situe juste en face de Vienne (photo: MV, août 2013).
Les plaques de rues de la commune de Saint-Pierre sont restées fidèles à la R.N.86 (photo: MV, août 2013).

Sources et documents: Atlas des grandes routes de France, Michelin (1951-52, 1959); Atlas routier et touristique France, Michelin (2014); carte Valence-Grenoble n°77, Michelin (1943); carte Environs de Lyon n°91, Michelin (1951); carte Lyon-Avignon n°93, Michelin (1942); carte Etat des routes, France–Sud, Michelin (été 1932); carte Vallée du Rhône n°246, Michelin (1993-1994); carte des Routes nationales (largeur des chassées au 1er janvier 1961), ministères des Travaux publics, des Transports et du Tourisme; Album du Vivarais, ou Itinéraire historique et descriptif de cette ancienne province, Albert Du Boys, Prudhomme (1842); Ardèche, terre de villages, Michel Rissoan, La Fontaine de Siloë (2009); Dictionnaire topographique du département du Gard, M.E. Germer-Durand, Imprimerie impériale (1868); Givors, port fluvial, Julien page, éd. André Martel (1950); Histoire de Condrieu et des environs, depuis l'an 59 avant JC jusqu'à notre époque, Adèle Buisson, Impr. de Timon frères (1850); «La circulation routière aux abords de Lyon», Edmond Berthaud, dans la Revue de géographie de Lyon (1953); «Le quartier Perrache, contribution à l'histoire et à la géographie de Lyon», Félix Rivet, dans Les Études rhodaniennes (1946); Les milliaires ardéchois d'Antonin le Pieux, Joëlle Napoli et René Rebuffat, Gallia (1992); «Quelques réflexions sur la construction des ponts du Rhône français», R. Kirchner, dans Les Études rhodaniennes (1948); Recueil général des lois et ordonnances, Administration du journal des notaires et des avocats (1841); Situation des travaux de l’administration générale des Ponts et Chaussées et des Mines, Imprimerie royale (1842, 1843); Statistique du département du Gard, volumes 1 & 2, Jacques Nicolas Hector Rivoire, Ballivet et Fabre (1842); Voyage à pied à travers le Vivarais et le Velay, François David Delétra, éditions Olivetan (2006); ampuis.fr; ardecol.inforoutes.fr; art-et-histoire.com; beauchastel.com; brignais.com; connaux.fr; culture.gouv.fr; givors.69.free.fr; lamulatiere.fr; lyon.pagesperso-orange.fr; mairiepse.fr; mairie-viviers.fr; patrimoine-ardeche.com; patrimoine.rhonealpes.fr; pilat-patrimoines.fr; saintgenislaval.fr; saint-montan.fr; saintnazaire30.fr; saintpierredeboeuf.com; serrieres.fr; ville-oullins.fr; Wikipédia, Wikisara. Remerciements: le Géoportail de l’IGN.

Borne de limites départementales Loire-Ardèche non loin d'Arcoules (photo: MV, août 2013).
Extrait de carte postale montrant le carrefour de la R.N.86 historique avec la D21 à Beauchastel (Ardèche) probablement dans les années soixante. Source: beauchastel.com. Merci d'informer l'auteur en cas de problème de droits autour de cette citation.

Localités et lieux traversés par la N86 (1959):
Lyon (N6, N7, N83, N84, N89)
La Mulatière
Oullins
Saint-Genis-Laval
Brignais
Les Sept-Chemins
Givors (N88)
Bans
Loire-s-Rhône
Saint-Romain-en-Gal
Sainte-Colombe
Verenay
Ampuis
Tupin
Condrieu
Verlieu
Chavanay
La Petite-Gorge
Saint-Pierre-de-Boeuf
Arcoules
Limony
Serrières
Peyraud
Champagne
Andance (N82)
Sarras
Arras-sur-Rhône
Vion
Saint-Jean-de-Muzols
Tournon-sur-Rhône
Mauves
Glun
Châteaubourg
Cornas
Saint-Péray
Guilherand-Granges
Soyons
Charmes-sur-Rhône
Beauchastel
La Voulte-sur-Rhône
Le Pouzin
Payre
Baix
Cruas
Meysse
Rochemaure
Le Teil
Violette
Viviers (N102)
Cité-du-Barrage
Bourg-Saint-Andéol
Saint-Just
Pont-Saint-Esprit (N94, N101)
Saint-Nazaire
Bagnols-sur-Cèze
Connaux
Pouzilhac
Valliguières
Les Tuileries
Les Croisées
Remoulins (N100)
Saint-Bonnet-du-Gard
Bezouce
Saint-Gervasy
Marguerittes
Nîmes (N99, N106, N113)

Le fier pont suspendu de La Voulte-sur-Rhône (photo: MV, août 2013).
La R.N.86 historique au sud de Saint-Just (photo: MV, août 2013).
Quelques kilomètres de la route restent estampillés R.N.86 vers Bagnols-sur-Cèze (photo: MV, août 2013).

A VOIR, A FAIRE

Givors: l’étonnante cité «les Etoiles» (1974) de l’architecte Jean Renaudie, ensemble de logements inscrit au patrimoine architectural du XXe siècle.
Saint-Romain-en-Gal: la cité gallo-romaine (et Vienne, en face).
Condrieu: la maison de la Gabelle, le quartier du port.
Chavanay: à une douzaine de kilomètres à l’ouest, le parc naturel régional du Pilat.
Serrières: le musée des mariniers, installé dans l'ancienne chapelle Saint-Sornin (XIIe siècle).
Andance: construit en 1827 par Marc Seguin et ses frères, le pont suspendu est l’ouvrage le plus ancien encore utilisé sur le Rhône.
Sarras: les gorges sauvages de l’Ay.
Tournon-sur-Rhône: les portes médiévales, les fortifications, le château, la collégiale Saint-Julien, le chemin de fer du Vivarais (et Tain-l’Hermitage en face).
Châteaubourg: la montée vers la corniche du Rhône (panorama).
Saint-Péray: le château de Crussol, forteresse médiévale du début du XIIe siècle (et Valence, en face).
La Voulte-sur-Rhône: le château, la vieille ville, le site des fonderies, le musée de paléontologie.
Le Pouzin: le pont romain sur l'Ouvèze et les ruines de l'abbaye Saint-Pierre de Rompon.
Cruas: le vieux village, l’ancienne église abbatiale, le château des Moines, bornes milliaires.
Le Teil: le site de Rochemaure (en amont), et Montélimar en face.
Viviers: le pont romain sur l’Escoutay, la cathédrale Saint-Vincent, l'ancien palais épiscopal, anciennes maisons, anciens hôtels particuliers. A 10 km au sud, le village de Saint-Montan.
Bourg-Saint-Andéol: étape plaisante en bord de Rhône. On peut visiter l’église Saint-Andéol, les vieux quartiers et leurs maisons classées, le bas-relief romain du dieu Mithra (IIIe siècle), sculpté dans le rocher du vallon de Tourne.
Saint-Just-d’Ardèche: route vers les gorges de l’Ardèche.
Pont-Saint-Esprit: le pont médiéval sur le Rhône, l'église Saint-Saturnin (XVe siècle), la maison des Chevaliers (XIIe siècle). A 10 km, la chartreuse de Valbonne.
Bagnols-sur-Cèze: la place Mallet, cœur de ville, des hôtels particuliers, la tour de l’Horloge.
Remoulins: le pont-aqueduc du Gard, monument antique le plus visité de France… L’ancien village de Castillon-du-Gard.
Nîmes: les arènes, la Maison carrée, le vieux Nîmes, le musée archéologique, le musée des Beaux-Arts, la tour Magne (vue), le musée du Vieux-Nîmes et une expo sur le blue jean denim, of course !

Page de l'encyclopédie des routes Wikisara consacrée à la nationale 86 (lire)
La page de présentation de l'historique et de l'itinéraire de la nationale 86 dans l'encyclopédie en ligne Wikipédia (lire)

Etat de la R.N.86 (1932 et 1961)

En 1932, au sortir de Lyon, nous montre la carte Michelin n°99 Etat des routes de la France du Sud, nous roulons sur une «route moderne au revêtement résistant sur fondations solides». Peu avant Givors et jusqu’à Andance, nous voici sur un itinéraire peu rapide mais goudronné. D’Andance à Tournon, il s’agit d’un très grand itinéraire, régulièrement entretenu. A priori, rien d’étonnant à cela puisque nous sommes ici sur le débouché de la Route bleue (R.N.82 historique) en provenance de Saint-Etienne. Après, cela se gâte: entre Tournon et Pont-Saint-Esprit, nous voici sur une itinéraire peu rapide. Ensuite, jusqu’à Nîmes, on retrouve un très grand itinéraire régulièrement entretenu. Il faut noter qu’en 1932, la R.N.86 prend la direction de Beaucaire depuis Remoulins. Le tracé Remoulins-Nîmes est, lui, numéroté R.N.87.

Une trentaine d’années plus tard, la route nationale 86 reste un itinéraire inégal. La carte publiée en 1961 par le ministère des Travaux publics, des Transports et du Tourisme le montre bien: au sortir de Lyon, la chaussée est toujours de bonne qualité (largeur de 8,6 à 10 m); jusqu’à Givors, la route reste agréable et le croisement facile (6,6 à 8,5 m). Après, c’est un peu plus délicat en direction de Vienne (largeur de 5,76 à 6,50 m). Par la suite, jusqu’à Condrieu, on retrouve une largeur de 6,6 à 8,5 m qui se réduit après (5,76 à 6,50 m) vers Andance. De Tournon au Teil, revoilà une largeur de 6,6 à 8,5 m sauf un passage nettement plus étroit (moins de 5,75 m) au sud du Pouzin. Du Teil au Pont-Saint-Esprit (5,76 à 6,50 m), puis on rencontre une très correcte chaussée large de 6,6 à 8,5 m jusqu’à Nîmes (largeur de 8,6 à 10 m aux approches de la cité).


A NOS LECTEURS: les photos, textes et dessins de ce site sont soumis au droit d'auteur. Pour toute autre utilisation, contacter l'auteur. Merci de votre compréhension...

Belles routes de France...
R.N.86: L'ATTRAIT DU SUD, RIVE DROITE DU RHONE
Dans la vallée du Rhône, on peut jouer au petit jeu «rive droite-rive gauche»… Entre Lyon et Nîmes (trajet de 1959), la route nationale 86 historique longe le plus souvent l’impétueux Rhône sur sa rive droite pour rejoindre le Gard et ses garrigues après un long trajet de près de 250 kilomètres. Voilà encore une alternative à la célèbre nationale 7, qui déroule son rouleau de bitume rive gauche… Si, avant 1952, cette route reliait Lyon à Beaucaire, elle est aujourd’hui largement déclassée en chaussée départementale comme –hélas- bon nombre de ses sœurs. Je vous invite une fois de plus à rouler en direction du soleil et de la Grande Bleue pour une virée photographique et documentée à nulle autre pareille et bien au chaud puisqu’elle a été réalisée au mois d’août 2013… On y rencontre une ribambelle de petites cités au charme fou, bien loin de la circulation infernale de l’A7!!

La R.N.86 le long du Rhône. Un passage parfois étroit entre l'eau et le chemin de fer (photo: Marc Verney, août 2013). En cliquant sur l'image vous revenez à la page principale.

On démarre de Lyon, où la route historique (la chaussée du Languedoc), qui passait sur le quai Perrache, construit à partir de 1771, a été totalement «effacée» deux siècles plus tard par l’autoroute A7 et sa circulation infernale. Jusque là, la R.N.86 (et ses ancêtres) passait la Saône sur le pont de la Mulatière, dont un premier exemplaire en pierre, nous dit Wikipédia, «est construit par la compagnie Perrache entre 1776 et 1782». Mais cet ouvrage est rapidement balayé par une crue en janvier 1783… Reconstruit en bois et ouvert en 1792, le nouveau pont est fortement abîmé lors du siège de Lyon (9 août-9 octobre 1793) suite au soulèvement de la cité contre la Convention nationale. Quand on consulte le site les-ponts-de-lyon.pagesperso-orange.fr, ce passage de la Saône a une importance croissante: Le trafic y est «en forte augmentation, 109 875 voitures en 1820 et 156 449 en 1825. Le pont se trouve alors au carrefour des routes royales de Bordeaux et de Toulouse et en relation directe avec les mines de Saint Etienne». Plus tard, en raison de l’ouverture du chemin de fer Lyon-Saint-Etienne, un pont mixte rail-route est mis en service en octobre 1830; mais, signale Wikipédia, il est «emporté comme de nombreux ponts lyonnais par la crue de 1840»… D’autres ouvrages suivront, en 1846, en 1856, en 1915… Le pont routier est refait en béton en 1936, mais, ravagé par la Deuxième Guerre mondiale, il ne sera à nouveau en service qu’en 1946!

Vue du pont de La Mulatière au début du XXe siècle (source: Wikipédia, document signalé comme libre de droits).

Dans le hameau de La Mulatière, l’ouverture du pont sur la Saône est une véritable révolution! Avant, nous dit le site lamulatiere.fr, depuis le Moyen Age jusqu'au début du XXe siècle, «le territoire a constitué un lieu de résidence pour les familles bourgeoises de Lyon dont la première connue est celle de Clément Mulat (vers 1380). La commune lui doit son nom». Au bout du pont, c’est désormais une route qui s'ouvre lentement à la fin du XVIIIe siècle: l’actuelle rue Stéphane-Déchant (D486). Celle-ci nous emmène en direction d’Oullins, où la chaussée traverse l’Yzeron. «Dès le IXe siècle après JC, raconte le site ville-oullins.fr, on atteste la présence d'une commune appelée Aulanius au sud-ouest de Lyon, sur la Narbonnaise, route ancienne qui reliait la capitale des Gaules à Narbonne». Au milieu du XIXe siècle, Alphonse Clément-Désormes, ingénieur et entrepreneur, installe dans la cité la Compagnie des hauts fourneaux et ateliers d'Oullins qui fabrique des locomotives. La réussite de cette industrie, liée plus tard à la célèbre compagnie PLM va faire prospérer Oullins pendant des années. Jouxtant Oullins, voilà maintenant Saint-Genis-Laval. Le bourg, nous dit le site municipal saintgenislaval.fr, «tire son nom de Saint-Genis ou Genest, comédien romain martyrisé sous Dioclétien. Au début du XIIIe siècle, pour le distinguer des autres villages du même nom, on lui ajouta le qualitatif de "de la vallée", qui au XVe siècle, se transforma en "laval"». La guerre de Cent-Ans va lourdement impacter le village, lit-on dans une intéressante plaquette publiée par la ville et l’Association saint-genoise du patrimoine des arts et des lettres (Aspal): occupé par des pillards, il est décidé d’y bâtir de solides remparts dès 1447. Ceux-ci vont enserrer les constructions situées le long de la chaussée du Languedoc. Puis, «pendant le règne de Louis XV, on a progressivement construit le grand chemin de communication entre Lyon et Saint-Etienne. En 1764, le tronçon d'Oullins à Saint-Genis-Laval a été ouvert, suivi en 1782 de la partie de Saint-Genis-Laval à Brignais, donnant ainsi naissance à la grande rue qui coupe l'ancien champ de foire», peut-on encore y lire. C’est aujourd’hui l’avenue Maréchal-Foch, puis la route de Lyon qui nous conduisent à Brignais.

On entre dans Brignais par la rue du Général-de-Gaulle (D386). A l’entrée de ce bourg, découvre-t-on sur le site brignais.com, le vieux pont sur le Garon «accueillait la route royale de Lyon à Saint-Etienne. L’édifice qui existait déjà au Moyen Age, comporte essentiellement deux arches de pierre de 4 mètres de hauteur». Là aussi, la guerre de Cent-Ans laisse des traces: en avril 1362, les Tard-Venus, une troupe de mercenaires formée après le traité de Brétigny, battent à plate couture l'armée royale, créant la panique dans le royaume de France... Au lieu-dit les Sept-Chemins, on laisse partir au sud-ouest la chaussée de Saint-Etienne. Ici, sur la carte d’état-major du XIXe siècle publiée par le site Géoportail de l’IGN, on ne voit pas encore de chaussée réalisée vers Givors. Si un itinéraire romain (par la vallée du Garon), puis médiéval semble avéré en ces contrées, il semble qu’une route moderne entre Condrieu et les Sept-Chemins par Givors n’ait été réalisée qu’au milieu du XIXe siècle, nous indique l’ouvrage Givors, port fluvial, publié sur le site givors.69.free.fr. Bien installée au bord du Rhône et à cheval sur le Gier, la cité de Givors se développe à l’orée du XIIIe siècle avec la mise en place d’un péage sur le fleuve par l’archevêque de Lyon. On l’appelle le Carcabeau, du nom de la pancarte où l’on pouvait lire les différents tarifs. Un port naît de tout ce trafic. Puis, au XVIIIe siècle, la production de charbon dans la vallée du Gier devient tellement abondante qu’il faut l’exporter: des convois de centaines de mules, puis un canal et enfin le premier chemin de fer (en 1832) transportent la houille vers les grands centres urbains. Givors est alors une cité florissante, aux activités industrielles multiples (verrerie, sidérurgie, faïences, briques, tuiles…). Fortement touchée par des bombardements durant la Seconde Guerre mondiale, la cité est victime d’une vague de désindustrialisation massive dès les années 70.

R.N.88, AUTAN EN EMPORTE LE VAN
La longue route historique de Lyon à Toulouse sillonne le Massif Central. A côté de la 4 voies, de jolis lacets charment le voyageur! (Lire)

La route n°86 prend la direction de Condrieu (photo: Marc Verney, août 2013).

Au sortir de Givors, la route (D386) prend la direction de Saint-Romain-en-Gal par Bans et Loire-sur-Rhône. La carte d’état-major du début du XIXe siècle publiée par le site Géoportail de l’IGN ne mentionne aucune chaussée en ces lieux. A 12 km, Saint-Romain-en-Gal fut, dans l'Antiquité, nous dit Wikipédia, «un vaste quartier résidentiel et commercial de Vienne», située juste en face, de l’autre côté du Rhône. Puis voilà Sainte-Colombe et Saint-Cyr, des lieux -là aussi- d’origine antique. A Ampuis, la chaussée s’ouvre au fameux vignoble des côtes-rôties. Wikipédia nous signale que le nom de ce village pourrait s’inspirer du latin emporium, qui désigne un «marché ou encore une place de commerce». Un castrum, nous explique le site ampuis.fr, «fut construit sur un des éperons de la Côte-Rôtie qui a conservé le nom significatif de la Garde. Il était destiné à couvrir la voie Narbonnaise et la vallée du Rhône». On suit désormais la route de Lyon jusqu’à Condrieu. Située à la convergence de trois départements, le Rhône, l’Isère et la Loire, la petite bourgade a une histoire bien remplie. Ses joutes nautiques rappellent son titre de capitale de la batellerie. Mais, de partout, on vénère son vin, célébré depuis l’Antiquité… Au début du XIVe siècle, Condrieu se trouve aux frontières du royaume de France… et se trouve donc mêlée aux combats qui oppose le roi à l’Empire, situé rive gauche…

Entrée sud de Condrieu (photo: Marc Verney, août 2013).

Au sud de Condrieu, la route nationale 86 historique entre dans le département de la Loire (D1086) où l’on passe dans la commune de Saint-Michel-sur-Rhône et traverse par la suite Chavanay. On va éviter de regarder sur la gauche la masse énorme de la centrale atomique de Saint-Alban-du-Rhône et remarquer au passage qu’ici, selon le site patrimoine.rhonealpes.fr, fonctionnait entre Saint-Alban et Verlieux un bac à traille reliant rives droite et gauche. «On sait qu'en 1857 il s'agit d'une traille, explique le site rhônalpin. Aucun vestige de cette dernière n'a été repéré en rive droite, côté Verlieux, au débouché de l'unique rue qui descend depuis la R.N. 86, en face de l'église du village, jusqu'en bord de Rhône». Voici maintenant Chavanay, un bourg situé sur la via Gebennensis (route de Genève), le lieu de passage de Genève au Puy des pèlerins se rendant à Saint-Jacques-de-Compostelle. Au XIVe siècle, nous dit le site pilat-patrimoines.fr, c'est une «place forte, capable par sa situation entre la rivière et le coteau de défendre l’accès à Pelussin et à Virieu. Un dédale de ruelles rappelle aujourd’hui la forme des remparts». Puis, longeant la Petite-Gorge et la Grande-Gorge, la D1086 s’oriente en direction de Saint-Pierre-de-Bœuf. Située à l’origine au bord du Rhône, la bourgade est désormais séparée du fleuve par le plan d’eau de la Lone. La cité a un passé industriel: en 1852, 300 métiers de tissage à soie y existent, écrit le site saintpierredeboeuf.com. La route longe le Rhône jusqu’à Arcoules et Limony (Ardèche). Notre R.N.86 historique y est numérotée D86.

La route traverse Saint-Pierre-de-Boeuf et conserve la mention R.N.86 sur ses plaques de rue (photo: Marc Verney, août 2013).

La prochaine étape est Serrières. L’ancien nom, d’origines latine et celtique, de Serrières, est Castrum Sarerie, découvre-t-on sur le site municipal serrieres.fr: «Castrum pour "château" et Sarerie pour "resserré". En effet, une grande partie des habitations serrièroises se situe entre la colline et le fleuve Rhône». De nombreux métiers de la ville étaient exclusivement liés au fleuve: «des pêcheurs, passeurs (conducteurs de bacs), radeliers (mariniers conduisant des radeaux de bois), crocheteurs (hommes chargeant et déchargeant les marchandises sur les quais), fustiers (charpentiers de marine), muletiers, contrebandiers et "pirates du Rhône" (pêcheurs clandestins)», indique encore le site. Mais cette activité intense s’éteint dès le milieu du XIXe siècle avec l’arrivée des bateaux à vapeur qui remontent le cours d’eau avec une grande rapidité et sans escales multiples. Le pont suspendu de Serrières sur le Rhône a été mis en service le 20 août 1828. En 1930, le premier ouvrage est remplacé par un pont suspendu sans pile centrale afin de faciliter la navigation. Après les destructions de la Seconde Guerre mondiale, le pont utilisé aujourd'hui date de 1950. Sur la rive droite, la R.N.86 historique prend la direction de Peyraud par l’avenue Isidore-Cuminal. Là, la chaussée contourne le village et l’ancienne rue du Pont-Romain enjambant le Crémieux. Après Champagne, la voie approche d’Andance, à la rencontre de la Route bleue (la R.N.82) qui descend d’Annonay.

R.N.82, RACCOURCI VERS L'AZUR
En 1959, l'automobiliste qui roule vers "la Côte" a le choix entre deux points de passage: Lyon ou suivre le raccourci de la Route bleue par Saint-Etienne et le redoutable col de la République... (suivre)

Andance: publicité pour la station thermale de Montrond-les-Bains, située sur la Route bleue, au nord de Saint-Etienne (photo: Marc Verney, août 2013).

Andance est donc une ville-carrefour sur la route du Sud. Son pont suspendu sur le Rhône, qui permet de rejoindre la R.N.7, toute proche, est le plus ancien d'Ardèche encore en service. Bâti en 1827 par Marc Seguin, il est d'une longueur totale de 185 mètres pour deux travées. Surélevé afin d'autoriser le passage des bateaux à vapeur, il est détruit par les Allemands en retraite en 1944 et restauré en 1957, nous précise le site patrimoine-ardeche.com. Y passait la R.N.86B, une des nombreuses annexes de la R.N.86 historique. Andance possédait un port qui était utilisé pour expédier le bois provenant des forêts du plateau du Vivarais. C'était aussi une des haltes pour les mariniers qui remontaient péniblement le fleuve. On sort du bourg par l’avenue de Beaucaire et la route file vers Sarras en frôlant les restes d'un mausolée romain dont tout le parement a disparu, la Sarrasinière, puis on passe la Cance. Ici, une ordonnance royale de 1841 publiée dans le Recueil général des lois et ordonnances propose la «rectification de la route royale n°86, de Lyon à Beaucaire, entre le pont de Cance, sur la rivière du même nom, et le pont de Sarras, sur la rivière d'Ay, département de l'Ardèche». Ici, à Sarras, dès l’an 145, la voie romaine dite «d'Antonin» longe le Rhône sur la rive droite, précise la page Wikipédia du bourg. De Sarras, part sur la rive gauche une nouvelle annexe de la nationale, la R.N.86C, qui dessert Saint-Vallier par un ouvrage qui tiendra bon de 1835 à la Deuxième Guerre mondiale. C’est aujourd’hui un pont en béton, réalisé à quelques mètres de son prédécesseur qui supporte ici le trafic au dessus du Rhône.

Plaque de la R.N.86 à Arras-sur-Rhône (photo: Marc Verney, août 2013).

Plus au sud de Sarras, la route de Tournon longe à nouveau de près une courbe du puissant fleuve. Ici, dit la Situation des travaux de l’administration générale des Ponts et Chaussées et des Mines d’avril 1842, «on a exécuté d'urgence une jetée d'enrochement le long du Rhône, en face du village d'Ozon, pour arrêter les corrosions du fleuve et sauver la route royale n°86, qui était vivement menacée. Ces travaux, qui s'exécutent par régie, sont fort avancés». Nous abordons Arras-sur-Rhône par la route Vivaroise. Village au fier passé, Arras garde le souvenir du passage d'une voie antique avec deux bornes milliaires (actuellement à Tournon). «D’où le lieu-dit impasse de l’Ancienne-Voie»,précise la page Wikipédia du village. Plus loin dans ce document, on évoque encore un empierrement et des terrassements réalisés en 1921 sur la nationale 86 alors que les ponts sur l'Ozon et le Pizon (2 km au sud) datent de la première partie du XIXe siècle. Auparavant, c'est un pont du Moyen Age (rénové en 1779) qui supportait le trafic vers le Languedoc. A Vion, 4 km plus au sud, l’existence d’une rue Royale desservant le village pourrait indiquer l’existence d’un autre cheminement historique pour la route principale. Avant Tournon-sur-Rhône, voilà Saint-Jean-de-Muzols, située sur la rive gauche du Doux, un ancien port sur le Rhône, d'abord grec puis romain par la suite. Le franchissement du Doux entre Saint-Jean-de-Muzols et Tournon se fait désormais à proximité de son embouchure par des ouvrages réalisés en 1829, 1859 et par un pont métallique plus récent, nous indique le site art-et-histoire.com. Par ailleurs, un autre ouvrage, dit le Grand Pont, bien plus ancien (vers le XVe siècle), existe en amont, sur l’actuelle D532.

Ancienne publicité présente sur un mur de Mauves (photo: Marc Verney, août 2013). Soyez sobres au volant!

Tournon-sur-Rhône se situe en face de Tain-l’Hermitage. «Au Moyen Age, voit-on dans Wikipédia, la population s'agglomère autour du château et donne naissance à un bourg castral» rapidement allié à la couronne de France. Au XIXe siècle, lit-on dans l’Album du Vivarais (1842), «on y fait un commerce considérable de vins fins des bords du Rhône, et il y a des entrepôts de bois de construction. A une demi-lieue de Tournon, se trouvent des eaux minérales sur le penchant d'une colline qui domine la route royale latérale au Rhône». En 1825, entre Tournon et Tain-l'Hermitage, un des premiers ponts suspendus à câble d'Europe est réalisé par l'ingénieur Marc Seguin, qui a ramené l'idée des Etats-Unis. Et ce sont pas loin de 400 grands ouvrages de ce type qui sont bâtis en France jusqu'en 1850, à la suite de celui de Tournon (malheureusement détruit, il reste une passerelle), nous raconte le site éducatif ardecol.inforoutes.fr. La sortie de Tournon en direction de Saint-Péray est quelque peu différente aujourd’hui de celle du XIXe siècle montrée par la carte d’état-major publiée par le Géoportail de l’IGN: si, au XXIe siècle, la D86 fait une large boucle par l’avenue de Nîmes, au XIXe, la chaussée de Lyon à Beaucaire colle à la colline, par la rue du Repos, le chemin de Saint-Vincent et des Rivoires. Autour de Mauves et de Glun, des avis d’expropriation lus dans le Journal de Tournon et rendus en 1891 évoquent déjà la rectification de la R.N.86. Une autre rectification au sud de Mauves, longue de 221 m, est «terminée en 1839», nous dit la Situation des travaux de l’administration générale des Ponts et Chaussées et des Mines d’avril 1842. A Mauves, entre 1840 et 1880, les travaux de correction du Rhône éloignent fortement le village du fleuve. Au fil du temps, ce village vigneron (l’appellation saint-joseph) s’allonge peu à peu sur un axe nord-sud, suivant les nouveaux tracés de la nationale.

Après Châteaubourg (péage moyenâgeux sur le halage des navires remontant le Rhône), voilà Cornas et Saint-Péray, hauts-lieux de la viticulture française, en face de Valence. Là, la voie franchit le Mialan et contourne la montagne de Crussol par l’est. Encore plus au sud, vers Soyons, la R.N.86 historique (route de Nîmes) passe un peu au large d’un précédent tracé longeant de plus près le bas des collines par les chemins du Vivier et de Clairfond (Géoportail). Charmes-sur-Rhône s’annonce. Dans ce bourg ancien, situé sur l’Embroye, on remarque que la chaussée du XIXe siècle, matérialisée sur la carte d’état-major publiée par le Géoportail de l’IGN, passe par le centre puis rejoint le tracé actuel (avenue de Provence). Plus au sud, la route royale franchissait le Turzon en aval du pont actuel. En 1843, la Situation des travaux réalisée par le ministère des Travaux publics évoque en effet «la construction d’un pont sur le torrent de Turzon». François David Delétra raconte, dans son ouvrage Voyage à pied à travers le Vivarais et le Velay son passage du Turzon en 1841: «Nous nous sommes enfoncés dans la boue. Le pont est en construction. Le matin, nous avions passé par-dessous en traversant les graviers et la rivière sous une de ses arches». Après, au rond-point placé au sud de la Cité de Château-Rouge, il faut suivre la D86E pour accéder à La Voulte-sur-Rhône par la R.N.86 historique. L’actuelle D86 de contournement a été réalisée dans les années 80 longtemps après les travaux d’aménagement et d’endiguement du Rhône au niveau de Beauchastel et de sa centrale hydro-électrique, qui, eux, datent de 1963. Le petit village de Beauchastel, que l’on croise en chemin, a une longue histoire; fortifié au XIIe siècle, ce fut, jusqu’en 1789, nous dit le site beauchastel.com, l’un des 70 greniers à sel du royaume de France. A la suite des nombreuses crues de l'Eyrieux, une digue est édifiée au bord de la rivière en 1860 et les habitations «glissent» de plus en plus vers la vallée, abandonnant le site ancien, situé sur la Grand Rue. Sur l’Eyrieux, se trouvait un pont suspendu (réalisé en 1841) aujourd’hui remplacé. Mais ici, la traversée s’est longtemps faite avec un bac, comme le rappelle l’impasse du bac, située au pied du vieux village…

Plaque de cocher à Saint-Just (photo: Marc Verney, août 2013).

L’entrée dans La Voulte-sur-Rhône se fait par l’avenue du 11-Novembre. La petite cité a longuement vécu (1828-1891) au rythme des hauts fourneaux et des fonderies installés sur la colline dominant le Rhône, raconte le site Patrimoine d’Ardèche, de la Société de sauvegarde des monuments anciens de l'Ardèche. Les bras du fleuve, au nord-est, ont été comblés avec le mâchefer provenant de l’industrie métallurgique. Le château, édifié dès le XIVe siècle, domine la ville. L’édifice a été très endommagé durant la Seconde Guerre mondiale. Le pont suspendu (R.N.86F), qui relie La Voulte-sur-Rhône à Livron, de l’autre côté du Rhône, a été construit de 1889 à 1891 par l'ingénieur Ferdinand Arnodin. La route nationale 86 historique quitte la cité par la rue de Roffy (l’actuelle D86 suivant le quai Anatole-France). Jusqu’au Pouzin, la chaussée et le chemin de fer suivent le Rhône au plus près. C’est dans le village du Pouzin, bien abîmé par les bombardements d’août 1944, que l’on trouve un pont antique (IIe siècle) sur l’Ouvèze. Il se trouve, nous dit Wikipédia, «sur la partie nord de la voie dite "d'Antonin le Pieux", c'est-à-dire reliant Nîmes et Valence en passant par Alba». Notre R.N.86 historique suit cet itinéraire jusqu’au Teil. Par ailleurs, en 1833, précise le site patrimoine.rhonealpes.fr, le Conseil général de l´Ardèche réfléchit à l'édification d'un pont suspendu sur le Rhône au Pouzin. Ce projet n'aboutira qu'en février 1849. Endommagé par les frappes alliées d'août 1944, l'ouvrage se voit remplacé par un pont-poutre métallique élaboré dès 1959. On y trouve la R.N.86G, qui se prolonge jusqu'à Loriol.

On quitte Pouzin par l’avenue Jean-Claude Dupau. La R.N.86 historique met le cap sur Baix, traverse le ruisseau du Sichier et arrive à Cruas, où l’on remarque, place de l’Eglise, deux bornes milliaires gallo-romaines de la voie «d’Antonin le Pieux». On ne s’attarde pas devant la centrale nucléaire qui encombre le paysage… Nous voici dans le bourg de Meysse; la chaussée y franchit le Lavézon. Rochemaure est atteinte 2,5 km plus loin. «Le vieux village a été construit autour de la voie romaine d’Antonin le Pieux et autour du château», précise le site Wikipédia. Vers Montélimar, la R.N.86H rejoint la rive gauche en franchissant le fleuve et le canal sur des ouvrages bâtis (ancien pont suspendu de 1858 et ouvrage moderne mis en service en 1978). Vers Le Teil, les choses se compliquent un tantinet: le Géoportail de l’IGN nous montre que la chaussée du XIXe siècle va suivre le chemin de la Lone alors que la route des années 50-60 va «coller» à la voie ferrée par le boulevard de la Croix-de-la-Lauze et le boulevard Pasteur. D’abord construit autour du château, le village du Teil va s’installer au pied de la colline; au XVIe siècle, un port se crée aux Sablons, ce qui favorise l'essor du commerce et l'expansion de la ville. Plus tard, au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, écrit le site éducatif ardecol.inforoutes.fr, la ville basse s'étend jusqu'au grand chemin du Languedoc (l'ancêtre de la R.N.86). En 1850, Mathieu Couturier industrialise l'exploitation de la chaux, ce qui avantage les hameaux situés au sud, après celui de Frayol. Le hameau de La Violette, se développe considérablement entre 1860 et 1880, profitant de la rectification –à cette époque- de la route impériale 86. En 1887, apparaît la société Lafarge (aujourd’hui fusionnée avec Holcim). En 1909, il y a 23 fours à chaux. C’est l’avenue Paul-Langevin qui nous emmène jusqu’au rond-point où l’on retrouve le tracé contemporain de la D86.

Plaque de cocher à Pont-Saint-Esprit (photo: Marc Verney, août 2013).

En direction de Viviers, la route passe au cœur du site historique du groupe Lafarge, une carrière de pierre à chaux creusée dans la montagne Saint-Victor, dominant le Rhône. «Dès 1864, raconte la page Wikipédia consacrée au groupe, le site livre 110 000 tonnes de chaux pour le canal de Suez. C'est le premier chantier d'envergure internationale pour l'entreprise». Au passage de la petite rivière de l’Escoutay, on ne peut pas manquer le beau pont romain du IIe siècle situé en amont de l’ouvrage qui supporte le trafic contemporain. Pour traverser l’Escoutay, le carte de Cassini du XVIIIe siècle publiée par le Géoportail de l’IGN montre une chaussée faisant le détour par le pont romain mais aussi une voie directe (un gué?) vers Viviers, tracé que l’on retrouve sur la carte du XIXe (mais avec un nouveau pont en aval de l’ouvrage romain). Le bourg a vu, dès le Ve siècle, l’installation de l’évêché, installé jusqu'alors à Alba, à une quinzaine de kilomètres au nord-ouest. Du Teil et de Viviers partait alors un itinéraire commercial important rejoignant l’intérieur du Massif Central. La ville, nous informe le site mairie-viviers.fr, «est rattaché au royaume de France en 1307. Aux XVe et XVIe siècles, le pouvoir est d'abord aux mains des marchands, auxquels s'associent quelques artisans et des hommes de loi: la cité est avant tout une ville bourgeoise». On quitte la ville ancienne par le faubourg Latrau. Au rond-point, part sur la gauche, la R.N.86I (D86I), qui traverse le Rhône pour rejoindre Châteauneuf-du-Rhône sur un pont suspendu édifié, nous dit le site patrimoine.rhonealpes.fr, «au début des années 1950 pour les Ponts-et-Chaussées de l´Ardèche, en remplacement d´un ancien ouvrage élevé en 1845, très endommagé pendant la Seconde Guerre mondiale». Au sud de Viviers, on remarque, sur la carte d’état-major publiée sur le Géoportail de l’IGN, plusieurs courtes rectifications de la route n°86 au niveau de l’avenue de la Gare.

La chaussée est désormais parallèle au défilé de Donzère et laisse partir sur sa gauche un nouvel accès vers l’autre rive du Rhône, vers le bourg de Donzère. Le pont suspendu du Robinet (R.N.86J historique), achevé en 1847, sera souvent victime de la force des vents, raconte patrimoine.rhonealpes.fr: ainsi l’ouvrage «ne résiste pas à la violente tempête de la mi-janvier 1902» qui détruit entièrement la travée gauche. Tout au long du XXe siècle, les autorités vont envisager la fermeture de l’ouvrage et son remplacement par un cheminement routier sur le barrage de Donzère-Mondragon, plus au sud. Mais qui ne se fera pas. La R.N.86 historique traverse maintenant la Cité du Barrage, liée, rapporte le site saint-montan.fr, aux gigantesques travaux d’aménagement du Rhône entrepris de 1947 à 1952. Car il fallait bien loger les milliers d'ouvriers mobilisés pour l'occasion... Passé le pont sur la Conche, la chaussée pique en direction de Bourg-Saint-Andéol. La R.N.86 historique (D86K) y pénètre par l’avenue du Général-de-Gaulle. A l’époque romaine, on y trouvait «une agglomération secondaire à l’emplacement de la vieille ville ainsi qu’un temple de Mithra dans le vallon de Tourne», indique le site Patrimoine d’Ardèche. Plus tard, c’est à partir des XIe et XIIe siècles que le commerce sur le Rhône profite à la cité. Quelques siècle plus loin, au XIXe siècle, la ville, lit-on sur patrimoine-ardeche.com, est «l’une des premières de France à bénéficier de l’électrification des rues en 1888 grâce aux revenus issus de la forêt du Laoul», un don –très ancien- d’une abbesse des clarisses d'Aubenas. De Bourg-Saint-Andéol, on peut rejoindre Pierrelatte par un pont routier construit en 1971 remplaçant un ouvrage suspendu datant de 1830. La sortie de la ville se fait par l’avenue Pierre-Brossolette. Après être passée au large de Saint-Marcel-d’Ardèche, la voie s’oriente vers Saint-Just, dernier village d’Ardèche coupé par la R.N.86 historique. Au sud, on passe la rivière Ardèche en saluant, au loin, le «pont cassé», un ouvrage construit au milieu du XVIIIe siècle, hélas détruit par les crues de ce tumultueux affluent du Rhône. L’ouvrage actuel daterait, lui, du milieu du XIXe siècle.

Circulation d'été sur la route des vacances de la rive droite du Rhône (photo: Marc Verney, août 2013).

On entre dans le département du Gard. Notre R.N.86 historique y est ici numérotée D6086. Première étape dans ce département: Pont-Saint-Esprit. La cité, explique le site officiel de la mairie, «s’appelait au milieu du Moyen Age Saint-Saturnin-du-Port. Le nom actuel de la ville lui vient de la construction du pont sur le Rhône par le frère de Saint Louis, le comte de Poitiers et de Toulouse, Alphonse de Poitiers. Le chantier commença en 1265 pour s’achever en 1309». Long de près d’un kilomètre, c'est le plus ancien de tous les ponts sur le Rhône reliant la Provence au Languedoc. Grâce au péage, il a longtemps fait la fortune de la petite ville. Après le boulevard Gambetta, la route n°86 suit, elle, l’avenue du Général-de-Gaulle. Nous voici dans les environs du village de Saint-Alexandre, où l’on remarque, sur la carte d’état-major du XIXe siècle publiée par l’IGN, une petite boucle à l’ouest, vite coupée par la chaussée moderne. Ce qui nous fait d’ailleurs rouler aujourd’hui sur un tracé plus ancien… A 7,5 km de Pont-Saint-Esprit, nous croisons le village de Saint-Nazaire. Dans une monographie rédigée par l’abbé Pierre Béraud et publiée sur internet (saintnazaire30.fr), on apprend que, «du fait de sa position sur une importante voie gallo-romaine, celle de Nîmes à Alba-Augusta (près de Viviers), le village dut souffrir à plusieurs reprises des invasions barbares, celles des Wisigoths et des Sarrazins notamment». Puis on découvre des précisions sur le tracé des chemins: «Au couchant du village, près des murailles passait la vieille route gallo-romaine. (...) Lorsque l'on tracera la nouvelle route royale, les remparts du levant seront percés ou démolis». L’article cite également un homme, Laurent Joseph Montcocol, issu d'une «vieille famille italienne venue en France à la suite des Médicis», et qui s'intéressa au XVIIIe siècle à l'état des routes de la région: «Connaissant bien la résistance du calcaire et de la carrière de Roquebrune, il résolut d'en utiliser les débris. Il les acheta et obtint un macadam de qualité dont les abords de son village bénéficièrent les premiers...».

La R.N.86 historique vers Valliguières (photo: Marc Verney, août 2013).

De Saint-Nazaire à Bagnols-sur-Cèze, il n’y a que 3,5 km. On traverse la Cèze sur un ouvrage dont les origines, écrit Wikipédia, remonteraient aux XIIe ou XIIIe siècles. «Ce pont est très irrégulier; son débouché paraît insuffisant: les eaux s'élèvent quelquefois jusqu'au sommet des arches» voit-on dans la Statistique du département du Gard de 1842. Si la date de construction de construction de l'ouvrage d'origine n'est pas correctement définie, on sait «qu'en 1312, il fut délibéré d'y faire des réparations», signale encore le même ouvrage de 1842. C’est également entre les XIIe et XIIIe siècles, lit-on dans Wikipédia, que la voie de Nîmes est déplacée d’un demi kilomètre vers l’est pour passer dans Bagnols par l’actuelle rue de la République. La cité se développe avec le droit de «tenir marché» obtenu de Louis VIII. En 1613, s’implante une première manufacture de soie; Bagnols-sur-Cèze en profitera durant trois longs siècles. Puis, dans les années cinquante, la construction d’une usine atomique à Marcoule propulsera la cité dans une autre époque… On quitte le centre par l’avenue Vincent-Auriol en direction de Connaux, bourg créé par les bénédictins de Saint-Pierre-de-Castres au XIIIe siècle, qui se trouve 8,5 km au sud. L’ancienne route royale abordait le petit village, apprend-on sur le site connaux.fr, «avec une côte de 20% et présentait un dénivelé de 5 à 10 mètres en regard de l’horloge actuelle. C’était une zone très marécageuse alimentée par les caprices du lit de la Tave». Aujourd’hui, Connaux, déjà contourné dans les années 50, coule des jours bien plus paisibles. Au sud de Gaujac, la chaussée entre dans des reliefs un tantinet plus tourmentés jusqu’à la hauteur du Pont-de-Saint-Hilaire. On passe successivement les villages de Pouzilhac (peu avant, on peut voir la chapelle ruinée de Saint-Privat, située sur la voie antique allant à Nîmes) et de Valliguières.

Anciens panneaux indicateurs à Remoulins (photo: Marc Verney, août 2013).

Voici maintenant Remoulins. La ville est fortifiée (remparts, tour de garde) au XIIe siècle, écrit le site ot-pontdugard.com. «Les terribles guerres de religions entre protestants et catholiques au XVIe et XVIIe siècle laisseront la ville dans un état de ruines. C’est au XIXe siècle que la vie du village s’organise tout au long de l’actuelle avenue principale» indique encore l'office du tourisme du pont du Gard (le célèbre pont-aqueduc romain est tout à côté!). Remoulins est un carrefour: on y croise la R.N.100 historique (D6100) vers Avignon, dont les remblais ont été édifiés dès 1788 (Wikipédia). A la sortie de la cité, découvre-t-on sur le site remoulins.fr, un pont suspendu sur le Gardon (ou le Gard), construit suivant les principes de Marc Seguin, fut achevé en mai 1830 et démonté en 1937. Remplaçant un passage par bac, il permettait à la route n°86 de continuer vers Beaucaire et Nîmes. Son successeur, ouvert au trafic en juillet 1937, connaîtra bien des ennuis: en 1958, plusieurs crues successives le déforment et un pont Bailey est mis en place jusqu’en 1961. Remis en état, il ne sera remplacé par l’ouvrage actuel qu’en 1994 (Wikipédia). C’est à la sortie de Remoulins que, jusqu’au début des années cinquante, la R.N.86 prenait la direction de Beaucaire alors que c’était la R.N.87 qui filait vers Nîmes. Les chaussées se sont ensuite appelées R.N.86 vers Nîmes et R.N.86L vers Beaucaire, comme on peut le voir sur l’Atlas des routes de France 1951-52 de Michelin… Voici maintenant Saint-Bonnet-du-Gard. Nîmes n’est plus qu’à une vingtaine de kilomètres. Le village de Bezouce se profile, côtoyé par la bruyante autoroute La Languedocienne, réalisée du début des années 60 à la fin des années 70. On passe Saint-Gervasy puis Marguerittes. Là, «au-dessus de la route royale de Nîmes à Avignon n°87, on voit des collines complantées de vignes et d'oliviers; et plus loin, à l'horizon, s'élèvent des montagnes couvertes de chênes verts», découvre-t-on dans la Statistique du département du Gard, volume 2.

La route entre Nîmes et Remoulins (photo: Marc Verney, août 2013).

Aujourd'hui, l'entrée dans Nîmes de la route n°86 (D6086) diffère singulièrement des chaussées anciennes: il est nécessaire de contourner l'aérodrome de Nîmes-Courbessac, agrandi dans les années trente et traverser les nombreuses voies du chemin de fer. Et, pour entrer plus avant dans la cité gardoise en respectant au mieux les anciens cheminements, il faut suivre la route d'Avignon. Nous aurons ainsi achevé un périple de près de 250 kilomètres vers le soleil…

Marc Verney, Sur ma route, mars 2016

Pour aller plus loin:

REJOINDRE LA R.N.7
La Côte d'Azur nous tend les bras. Fréjus, Cannes, Antibes, Nice, Monaco et Menton... Que des noms qui chantent au pays du soleil!! Bienvenue sur la route des vacances (lire)

L'ESPAGNE PAR LA R.N.9
Perpignan, la Costa Brava, Barcelone et plus loin la Costa del Sol... Bienvenue sur l'autre route des vacances qui nous emmène au soleil torride de l'Espagne (lire)

Retour à la page principale (clic)