Détail d'anciennes plaques situées à Vienne, Loriol, Livron et Leyne. (photos: MV, avril et octobre 2008).
Elégante borne kilométrique de la N7 dans l'Isère. (photo: MV, avril 2008).
AVERTISSEMENT: les textes, photos et dessins de ce site sont soumis au droit d'auteur. Pour toute autre utilisation, contacter le concepteur-rédacteur de Sur ma route. Merci de votre compréhension...

Localités traversées et desservies par la N7 de 1959 entre Lyon et Aix-en-Provence:
Lyon (N6, N83, N84, N86, N89)
Saint-Fons
Vénissieux
Feyzin
Saint-Symphorien-d'Ozon
Les Pins
Estressin
Vienne (N538)
Vaugris
Auberives-sur-Varèze
Le Péage-de-Roussillon
Revolon
Saint-Rambert-d'Albon
Le Creux-de-la-Thine
Bancel
Saint-Vallier
Serves-sur-Rhône
Erômes
Gervans
Tain-l'Hermitage
Pont-de-l'Isère
Bourg-lès-Valence
Valence (N92)
Portes-lès-Valence
La Paillasse
Fiancey
Livron-sur-Drôme (N93)
Loriol-sur-Drôme
Saulce-sur-Rhône
Le Logis-Neuf
La Coucourde
Derbières
L'Homme-d'Armes
Montélimar
Donzère
Pierrelatte
Lapalud
La Croisière (N94)
Mondragon
Mornas
Piolenc
Orange
Courthézon
Bédarrides
Sorgues
Le Pontet
Avignon (N100)
Pont de Bonpas
Saint-Andiol
Plan-d'Orgon (N99)
Orgon
Sénas (N538)
Pont-Royal
Cazan
Lambesc
Saint-Cannat
Lignane
La Petite-Galade
Les Gervais
Celony
Aix-en-Provence (N8, N96)

Le monument du "45e parallèle à Pont-sur-Isère: "Ici commence le Midi" (photo: MV, octobre 2008).

A VOIR, A FAIRE
Restons modestes… la vallée du Rhône est si riche en lieux d’histoire que nous n’allons ici pas prétendre ici à l’exhaustivité…
Vienne: les musées de la cité, comme le musée des Beaux-Arts et d'Archéologie, le musée archéologique Saint-Pierre, le musée du cloître de Saint-André-le-Bas et le musée de la Draperie. La ville conserve de nombreux restes de la période gallo-romaine: le Temple d'Auguste et de Livie, le jardin archéologique de Cybèle, le théâtre antique (Ier siècle), la pyramide (unique vestige du cirque romain). On doit aussi aller visiter le site archéologique de Saint-Romain-en-Gal. Sur les berges du Rhône, un jardin public montre les vestiges d'une voie romaine. Autres lieux: la cathédrale Saint-Maurice (XIIe-XVIe), maisons et cours Renaissance dans la rue des Orfèvres.
Valence: le musée de Valence, art et archéologie; la maison des Têtes, construite au début du XVIe siècle; pièce maîtresse des remparts, voilà la porte Monumentale; un étonnant réseau de canaux de plus de 16km traverse Valence... Amusant, un kiosque à musique de 1862, situé sur le Champ de Mars, a inspiré à Raymond Peynet en 1942 ses célèbres amoureux.
Montélimar: le château des Adhémar (XIe-XIVe), un rare exemple d’ensemble palatial d’architecture romane. Le Palais des bonbons et du nougat raconte l'histoire du sucre, des bonbons et du nougat. L'épopée de la R.N.7 historique y est aussi évoquée.
Piolenc: le musée Mémoire de la Nationale 7.
Orange: la culture gallo-romaine imprègne la ville, on peut admirer le théâtre antique, renommé pour sa qualité acoustique, et bien sûr, l'arc de triomphe, qui accueille les voyageurs de la N7 dans la cité.
Avignon: la ville reçoit annuellement quatre millions de visiteurs… Flanquées de 39 tours et percées de sept portes, les murailles de la cité ancienne (XIVe siècle) attirent tous les regards des voyageurs! Intra-muros, la promenade est douce dans les rues étroites d’Avignon… Incontournables: le palais des papes (XIVe siècle) et le pont Saint-Bénézet (XIIe siècle). Il y a un monde fou en juillet, lors du célèbre festival de théâtre.
Aix-en-Provence: tout d'abord, le touriste de passage voulant s'imprégner de l'atmosphère d'Aix peut flâner sur le cours Mirabeau, la voie la plus connue de la ville, tracée au XVIIe siècle sur d'anciens remparts. A son extrémité ouest, il y a la monumentale fontaine de la Rotonde, bâtie en 1860. Pour mieux connaître la cité et son histoire, voilà le musée du Vieil-Aix, qui reconstitue la vie de la ville sous l'Ancien Régime et au XIXe siècle. Situé dans un bâtiment de 1671, le musée Granet regroupe une importante collection de peintures. Aix-en-Provence est riche d'édifices des XVIIe et XVIIIe siècles, dont de nombreux hôtels particuliers. L'église Saint-Jean-de-Malte est la première église gothique de Provence. On peut aussi visiter l'élégant cloître Saint-Sauveur. Bref, avec 140 bâtiments classés, Aix-en-Provence possède le plus riche patrimoine français après Paris! Spécialité: les calissons.

Ancienne plaque de la RN7 située non loin de La Coucourde (photo: MV, oct. 2008).
A Orgon. (photo: MV, octobre 2008).
Sources et documents: Atlas des grandes routes de France, Michelin (1959); carte n°81 Avignon-Digne, Michelin (1946); carte n°91 Environs de Lyon, Michelin (1951); carte n°93 Lyon-Avignon, Michelin (1942); carte n°959 France, Grandes routes, Michelin (1963); Atlas et géographie de la région lyonnaise, René Lebeau, Flammarion (1976); C'était la Nationale 7, la Route Bleue, la Route Nationale 6, Thierry Dubois, éd. Drivers (2010); Dictionnaire géographique historique, archéologique et biographique des communes du département de Vaucluse, Jules Courtet, typographie de Bonnet fils (1857); Document d’évaluation du patrimoine archéologique urbain, Nuria Nin, archéologue de la ville d'Aix-en-Provence, Jean Guyon et Lucien Rivet, chercheurs du CNRS au centre Camille-Jullian, avec la collaboration de Philippe Bernardi et Noël Coulet, Association pour les fouilles archéologiques nationales (1994); Environs de Montélimart, carte dressée par le cap. Piales d'Axtrez, imp. de Monrocq (1894); Essai sur la statistique, l'histoire et les antiquités du département de la Drôme, Delacroix, impr. Jacques Montal (1817); Guide Bleu de la France automobile, Hachette (1954); Histoire d’Aix-en-Provence, ouvrage collectif, Edisud (1977); Histoire de la principauté d'Orange, A. de Pontbriant, Seguin frères (1891); Histoire des routes de France, du Moyen Age à la Révolution, George Reverdy, Presses de l’ENPC (1997); Histoire de Valence et de sa région, Die, Crest, Robert Bornecque, éd. Horvath (1981); Histoire de Vienne et de sa région, André Pelletier, éd. Horvath (1980) «J. Germain – Les routes du Rhône à travers les âges», Maurice Degros, dans Les Etudes rhodaniennes, vol. 13 (1937); Le dico de Lyon, Anthony Serex, éd. Déclics (2012); «Le réseau viaire antique du Tricastin et de la Valdaine: relecture des travaux anciens et données nouvelles», Cécile Jung, dans la Revue archéologique de Narbonnaise, éditions de l'association pour la Revue archéologique de Narbonnaise (2009); Le Rhône, Louis Barron, Henri Laurens éditeur (1891); Mémoire statistique sur le département de Vaucluse, Maxime Séguin de Pazzis, Quenin (1808); Notice historique sur Livron, Drôme, par l'abbé Abel Vincent, impr. de J. Marc-Aurel (1853); Redécouvrir la Nationale 7, Dominique Pagneux, éd. Ouest-France (2010); Statistique du département de la Drôme, Nicolas Delacroix, Borel, imprimeur (1835); Vienna: Vienne, André Pelletier, Presses universitaires Lyon (2001); art-et-histoire.com; ccpaysroussillonnais.fr; ciq-puyricard.org; etudessorguaises.fr; feyzin.passe-simple.over-blog.com; lambesc.fr; livron-sur-drome.fr; mairie-chanas.fr; mairie-lapalud.fr; patrimoine.rhonealpes.fr; philippe.deporte.pagesperso-orange.fr; plandorgon.fr; saint-fons.fr; saintsymphoriendozon.fr; regordane.fr; routard.com; ville-pierrelatte.fr; ville-tain.fr; Wikipédia; Wikisara. Merci également à l’IGN (Géoportail), la BPI du centre Georges-Pompidou.
A l'entrée d'Aix-en-Provence, au moment de la Seconde Guerre mondiale. Extrait d'une photo d'actualités militaires non datée. NOTA: ce site respecte le droit d'auteur et le droit de citation. En cas de problème sur les éléments publiés, merci de contacter l'auteur.

Belles routes de France...
R.N.7: SA MAJESTE LE RHONE EN SA VALLEE (III)
Voici donc la troisième partie de notre nouvelle balade vers l'azur: la vallée du Rhône. Après Lyon, finie la grisaille du Nord. Balayé par le capricieux mistral, le sillon rhodanien nous précipite au pays des cigales et du nougat. Mais que de changements en cinquante ans sur la route des vacances!! La N7 de 1959 ne ressemble en rien à la moderne chaussée -souvent déclassée- que nous avons sous les yeux au XXIe siècle. Entre les années cinquante et les années soixante, un nouveau et large ruban de goudron se fraye peu à peu un chemin entre nationale, voie ferrée, canaux, fleuve: l’autoroute A7. Et, du coup, l’ancien tracé se perd entre les oliviers et… les centres commerciaux qui poussent comme des herbes folles à la lisière des villes. Reste un brin de nostalgie. Et les températures qui remontent petit à petit...

La RN7 à Erôme (Photo: Marc Verney, octobre 2008).

Un petit mot d’histoire tout d'abord : après l’époque romaine et la via Agrippa, creusée sur les premiers escarpements des collines surplombant le fleuve, la vallée du Rhône n’a pas toujours été le meilleur chemin pour aller de Paris aux bords de la Méditerranée. Depuis le traité de Verdun en 843 –qui divise l’Europe en trois- jusqu’au XIIIe siècle, le chemin de Regordane contourne les abords du Rhône et passe par la Haute-Loire, l'Ardèche, la Lozère et le Gard pour rejoindre finalement Saint-Gilles-du-Gard. Il est très utilisé par les commerçants et les voyageurs car la vallée du Rhône se situait donc –à l’époque- hors du royaume de France. Profitant d’une faille géologique dans les montagnes cévenoles, «constamment aménagée, pavée par endroits (les calades, NDR), dotée de ponts et de péages», nous dit le routard.com, cette route fut très fréquentée jusqu’au début du XIVe siècle. En 1308, un nouveau traité repousse la frontière jusqu’au Rhône; c’est la fin du chemin de Regordane. La circulation Nord-Sud revient peu  à peu vers le fleuve. Au XVIe siècle, nous dit Georges Reverdy dans son Histoire des routes de France, du Moyen Age à la Révolution, une route de poste est établie entre Lyon et Marseille. Mais c’est seulement à la fin du XVIIIe siècle que la circulation peut emprunter facilement la rive gauche du Rhône du Nord au Sud.

La R.N.7 historique (auj. D307) quitte Lyon par Saint-Fons. «Sous l’Antiquité, nous dit le site de la cité, Saint-Fons n’était qu’un passage entre Vienne et Lyon. Autour de l’an 1000, un hospice a été construit à la croisée des Quatre Chemins, destiné aux pauvres et aux pèlerins. Au XVe siècle, un relais de poste est érigé». Plus tard, les faubourgs industrieux d'antan se transforment en vastes cités de béton peuplées d’ouvriers travaillant dans les industries de la banlieue lyonnaise. C’est en 1854, nous signale l’encyclopédie Wikipédia, que l’on y installe les premières usines chimiques «liées à l’industrie textile». Jusqu'au 27 mars 1888, l'histoire de Saint-Fons est étroitement liée à celle de Vénissieux, la commune d'à-côté. A cette date, Saint-Fons devient une commune indépendante. L’histoire de Vénissieux nous ramène quant à elle à l’ère automobile: un des grands personnages de ces lieux s'appelle Marius Berliet. Ce fabricant de moteurs s'installe en 1915 dans cette localité du sud de la région lyonnaise pour y fabriquer des camions, à la demande de l'armée. Et, pour loger ses ouvriers, il y fait construire la cité Berliet. La célèbre marque vivra jusqu'en 1978, absorbée par Renault Véhicules Industriels (RVI) devenu en 2002 Renault Trucks. La ville, considérée comme la «porte sud de l'agglomération lyonnaise», intègre le département du Rhône en 1852.

Feyzin est la localité suivante. Restée rurale jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, nous indique Le dico de Lyon, Feyzin s’industrialise fortement «dans la plaine alluviale et la raffinerie est mise en service en 1964». Celle-ci explose en janvier 1966, faisant 18 morts, plus de 80 blessés et endommageant près de 1500 habitations. La R.N.7 historique y passe au lieu-dit de la Bégude. On y trouvait des auberges et un relais, nous apprend un article du Progrès publié par le site Feyzin passé simple. La route quitte les environs directs du fleuve Rhône et s’élève sur les contreforts de la vallée. Quelques kilomètres plus au sud, voilà Saint-Symphorien-d'Ozon. L’endroit est cité au VIe siècle par Grégoire de Tours dans son Histoire des Francs sous le nom d’Octavum, «du nom de la huitième borne milliaire au départ de Vienne», nous dit Thierry Giraud dans un Petit carnet du visiteur curieux de Saint-Symphorien publié sur le site de la commune (*). Plus tard, sous l’égide de la Savoie, précise l’ouvrage Redécouvrir la Nationale 7, le bourg «jouit au Moyen Age d’une grande prospérité liée à la tenue de grandes foires». Au XVIIIe et XIXe siècles, la route de Provence passe par le centre-ville (ancienne Grande Rue, aujourd’hui rue Centrale, D149E). De lourds travaux d’alignement -menés de 1790 jusqu’au milieu du XIXe siècle- modifient radicalement le visage de la cité. Encore plus tard, la déviation de Saint-Symphorien, réalisée de 1941 à 1946 écarte totalement le trafic automobile du centre du bourg. De l’époque des diligences, nous narre encore le Petit carnet du visiteur curieux, reste la mémoire de l’auberge de la Croix-Blanche, qui fut agrandie au début du XIXe avant d’être rendue obsolète par le chemin de fer… Dès lors, «la route remonte et vient déboucher au-dessus de Vienne: belle vue, à gauche, sur le Mont-Blanc et les Alpes», nous raconte, ici, le Guide Bleu de la France automobile (Hachette, 1954).

Ancienne plaque de la N7 à Vienne. Notez l'utilisation amusante de l'italique... (Photo: Marc Verney, avril 2008).

On sort du département du Rhône peu après le village des Pins. C'est désormais le département de l'Isère qui héberge le tracé de la R.N.7. «En arrivant de Lyon, nous dit le Guide Bleu de la France automobile, la route vient longer le Rhône et franchit la Gère». Situé «sur les pentes rapides qui bordent la rive gauche du Rhône», nous rappelle encore le Guide Bleu, le site de Vienne est occupé depuis la plus haute antiquité. Capitale de la tribu des Allobroges au IIe siècle avant JC, la cité tombe plus tard sous la coupe de Rome qui en fait l’une de ses colonies. L’histoire est mal connue et les temps troublés, mais c’est sans doute l’empereur Auguste, nous explique l’Histoire de Vienne et de sa région, «qui donne à la cité le titre de colonie», probablement vers 16 ou 15 av. JC. L’homme fait réaliser un plan d’urbanisme pour la cité et finance le mur d’enceinte. La ville entretient d’intenses liens commerciaux avec le pourtour méditerranéen et s’embellit rapidement. Au XIVe siècle, le Dauphiné est cédé à la France et Vienne perd de son aura. La circulation reprend au XVIIIe, des industries textiles s’installent au bord du Rhône au XIXe. On entre dans la ville par le quartier d’Estressin. Là, nous dit Wikipédia, «avant la construction du quai Pajot au XVIIIe siècle, la voie de Lyon à Marseille passait par la rue Druge». Puis, l’ancienne chaussée, ce qui est parfaitement visible sur la carte d’état-major du XIXe siècle publiée sur le site Géoportail de l’IGN -avant la poursuite de la construction des quais le long de Rhône au XIXe siècle- emprunte la rue Boson puis le cours de Verdun et enfin l’avenue du Général-Leclerc (D1007A). Plus tard, au milieu du XXe siècle, les difficultés de circulation imposent de lourds travaux: de 1957 à 1965, indique l’Histoire de Vienne et de sa région, se déroulent «les travaux de l’autoroute du Sud dans la traversée de la ville», bâti en encorbellement sur les quais… Un choix pas vraiment heureux qui impose la construction d’un autopont au-dessus de la place principale de Vienne. Dès 1975, on choisit de contourner la ville par l’autre rive du Rhône, la ville s’apaise… C'est à Vienne, en 1925, que Fernand Point fonde son fameux restaurant La Pyramide, le premier à avoir obtenu trois étoiles au guide Michelin.

R.N.538: TOUT UN ROMANS!
Au sortir de Vienne, un chemin nous emmène vers le Sud par les plus beaux détours provençaux. Un véritable régal piur le conducteur tranquille (lire)

On quitte Vienne en s'écartant légèrement du Rhône. Voilà la commune de Reventin-Vaugris. Là, peu après Vaugris-Gare, la carte d’état-major du XIXe siècle publiée sur le site Géoportail de l’IGN y montre clairement un ancien tracé de la route royale passant par le chemin du Vieux-Pavé alors que la chaussée du XIXe (la route du Grand-Pavé), plus adoucie, longe vers l’est, la courbe de l’autoroute A7. Puis la route côtoie l’aérodrome de Vienne-Reventin, créé en novembre 1913 et qui a la particularité d’avoir une piste en gazon et un taxiway en dur… en fait, l’ancienne piste! Une longue ligne droite et voilà Auberives-sur-Varèze, petite cité qui porte d’après le site ccpaysroussillonnais.fr un nom d’origine latine: Alba Ripa, qui signifie «blanche rive», en raison de la présence de kaolin dans le sol, exploité autrefois par les potiers. L'automobiliste amateur de bons vins n'hésitera pas à faire le détour par Condrieu, de l'autre côté du fleuve. La R.N.7 historique entre dans la commune de Péage-de-Roussillon. Le nom vient –évidemment- d’un péage, concédé en ces lieux par l’empereur Frédéric au seigneur de Roussillon (il perdurera jusqu’à la Révolution française). En 1958, on y a inauguré la déviation (2×2 voies) qui compose désormais l'une des plus anciennes parties de l'autoroute du Soleil qui s’y branche en 1964. Sa longueur est quand même bien modeste: environ 6 km. A Chanas (le nom vient du chêne), on trouve des traces, nous dit la municipalité sur son site, de l'antique voie romaine Vienne-Valence, «plus tard appelée "voie Magne" (la grande voie)». On y trouve d’ailleurs une ancienne borne milliaire, devenue partie intégrante d’une… fontaine! La route nationale 7 historique traverse le Dolon et voilà Saint-Rambert-d'Albon, dans la Drôme, «une petite ville qui a dû son essor au chemin de fer», nous apprend Thierry Dubois, dans son ouvrage C'était la Nationale 7, la Route Bleue, la Route Nationale 6, ce «qui permettait d’embarquer les fruits sur le train». Car, désormais, les arbres fruitiers défilent au bord de la chaussée… C’est là, que le 21 avril 1919, l’aviateur Jules Védrines et son mécanicien Marcel Guillain trouvent la mort dans l’accident de leur Caudron C23 lors d’un raid Paris-Rome.

Traverse de Saint-Vallier dessinée sur l'Atlas de Trudaine concernant la généralité de Lyon au XVIIIe siècle. On y remarque le projet de l'élargissement des rues et le rétablissement du pont (source: culture.gouv.fr)

Après le Creux-de-la-Thine, la route passe non loin d'Andancette, où le plus ancien pont suspendu du Rhône (1827, restauré en 1985) permet aux automobilistes ayant emprunté la «route bleue» N82 de rattraper l'itinéraire principal. Auparavant, on traversait le fleuve à l’aide d’un bac à traille (l’embarcation se déplace le long d’un câble). A Saint-Vallier, la route nationale 7 historique s'approche au plus près de l’eau. Ici, depuis le Moyen Age, on traversait le Rhône par bac, nous explique le site internet du patrimoine rhônalpin. Un pont est projeté par le maire de Saint-Vallier en 1830. L'ouvrage, un pont suspendu, approuvé par le roi Louis-Philippe en 1833, est achevé en 1835. Détruit durant la Seconde Guerre mondiale, il est remplacé par un ouvrage en béton en 1972. Dans la ville, la route royale franchissait la Galaure par «un pont de pierre d'une seule arche de 60 pieds d'ouverture, détruite par une formidable crue de la Galaure en 1767», écrit le site art-et-histoire.com. Un nouveau pont de trois arches est établi par l’administration napoléonienne vers 1805. L’ancienne Ursuli, petit port fluvial au temps de l’époque gallo-romaine, devient –au XIXe siècle- un site de production de «porcelaine hygiénique» servant à réaliser du carrelage, des encriers… des objets publicitaires, comme les carafes à eau Ricard! En 1958, la R.N.7 contourne la ville par les quais. Là, quelques vues, échappées belles sur le fleuve sont absolument ravissantes... A Serves-sur-Rhône, dominée par son château qui garde le passage, l’ancien trajet suit la rue Impériale alors que la R.N.7 se retrouve en bord de fleuve. Au XIXe siècle, des potiers y fabriquent des millions de pipes en terre cuite… Après les villages d’Erôme et de Gervans, au détour d'une courbe, nous voici à Tain-l'Hermitage, entourée par les vignobles du crozes-hermitage. Sous le nom de Tegna, la cité, située sur la voie romaine conduisant à Valence, «dépendait de la colonie romaine de Vienne» annonce le site ville-tain.fr.

C'est aussi par ici que le soleil commence vraiment à «taper» sur les carrosseries... D’ailleurs, dans l’ouvrage Atlas et géographie de la région lyonnaise, il est écrit que, «dans la vallée du Rhône, les premiers bouquets de chênes verts apparaissent dans le défilé de Tournon, où l’on pouvait jadis contempler le premier bosquet d’oliviers»… Au lieu-dit la Mule-Blanche, la carte d’état-major publiée par le Géoportail IGN montre une «voie romaine» qui franchit l’Isère sans doute vers Beaumont-Monteux (au sud, on retrouve un chemin de la Vimagne, comme via magna?). A l’ouest, la R.N.7, de facture plus récente, arrive à Pont-de-l'Isère; on y trouve le monument de la «latitude 45» qui précise ainsi l'arrivée de la R.N.7 aux portes du Midi. Pour les puristes, ce monument, orné de deux sculptures façonnées par Deluol (1951) n'est pas à sa place initiale: la nationale ne franchit plus l'Isère sur le pont de pierre, construit en 1827. Fragilisé par un dynamitage durant la Deuxième Guerre mondiale et la montée du niveau des eaux due aux travaux sur le Rhône, celui-ci est désormais abandonné. On peut rouler sur quelques centaines de mètres d'ancien macadam autour du vieux pont mais l'accès direct n'est plus possible. L’histoire du franchissement de l’Isère est compliquée, comme souvent: après un premier pont de pierre disparu au XIIIe siècle, des bacs sont mis en place à Sillard et à Beaumont-Monteux. Puis, c’est au tour d’ouvrages en bois de supporter le trafic. Le dernier sera brûlé en 1814 devant l’avancée des troupes autrichiennes... Le pont de pierre de 1827 reste en service jusqu’au cœur des années 70 (philippe.deporte.pagesperso-orange.fr).

R.N.92: AUX CONTOURS DES MONTS
Entre Genève et Valence, cette belle route au parcours atypique visite monts et merveilles avant d'atterrir au pays des cigales... Une course au soleil qui va vous plaire (lire)

Après le lieu-dit le Saut-des-Chèvres, la route traverse désormais Bourg-lès-Valence, puis entre dans Valence, préfecture de la Drôme. Traversée un peu fastidieuse sur les grands axes du centre-ville au milieu d'une circulation intense. Là encore, tout a été chamboulé: l'autoroute du Soleil passe sur les quais du Rhône et la N7 moderne contourne la cité par une quatre-voies reliée à l'autoroute A48 de Grenoble. Du coup, Valence est de nos jours un peu «encerclée» par un flot de bitume peu seyant... Et puis les ennuyeux et sempiternels centres commerciaux des portes de villes jonchent le paysage d'une multitude d'écueils publicitaires aux couleurs criardes. Pourtant Valence a un beau passé… L’Histoire de Valence et de sa région, Die, Crest, nous dit que, «sous la domination romaine, Valence est un camp militaire permanent chargé de surveiller la vallée du Rhône». Le commerce du sel, du XIe au XIVe siècles, bénéficie à la ville, toujours entourée de ses murailles gallo-romaines (l’un des faubourgs, au sud porte le nom de Saunière). Le fleuve, qui est ici frontière entre le royaume de France et le Saint-Empire romain germanique jusqu’au XVe siècle, est aussi un axe commercial majeur: la cité, nous dit l’encyclopédie Wikipédia «profite de sa position à un point de changement du régime des vents dans la vallée du Rhône», la remontée vers le Nord pouvant notamment se faire à la voile. Au XVIe siècle, des manufactures de draps y prennent une grande importance. C'est à Valence -en mai 1755- que se finit l'épopée de Louis Mandrin, le «Robin des bois» français qui défiait le pouvoir royal en redistribuant le produit de ses vols... En 1799, raconte encore l’Histoire de Valence et de sa région, Die, Crest, «la route de Lyon à Marseille évite la traversée du centre et longe un mail planté d’arbres qui a remplacé les murailles et les fossés». En 1956, une déviation ramène les automobilistes le long du Rhône (aujourd’hui D2007n). La ville, étape reconnue sur la «route bleue», héberge l'une des plus grandes tables de l'époque de la N7 historique, la maison Pic, fondée en 1936. On quitte Valence par l’avenue Victor-Hugo, l’ancienne chaussée royale.

Plaques de cocher de la N7 situées à Livron et à Loriol (photos: Marc Verney, octobre 2008).

A Portes-lès-Valence, l’itinéraire historique emprunte la D7 (avenue de Marseille). De Valence à Montélimar, la nationale 7 de 1959 suit la vieille route postale empruntée par les diligences. Les villages et bourgs de La Paillasse, Loriol-sur-Drôme, La Coucourde ou bien encore L'Homme-d'Armes, étaient tous des relais sur le chemin du Sud. A La Paillasse, une borne milliaire (déplacée en 1757) démontre le passage du chemin romain dans le coin; elle porte une inscription latine dédiée à Antonin le Pieux et indique 6000 pas depuis Valence. A Livron, peu avant Loriol, le pont sur la Drôme, commencé en 1766, ne fut livré, d’après la Statistique du département de la Drôme qu’en 1789: «Remarquable par la longueur de ses arches, il est remarquable encore par sa hauteur, sa décoration, la beauté des matériaux qui y ont été employés, les abords et les levées qui forment un vaste entonnoir au cours de la rivière». Il remplace alors d’anciens ouvrages, emportés par les fortes crues, ou bien encore un périlleux passage à gué… Du coup, nous dite le site de la cité, il «va être à l'origine du développement de la ville basse avec ses relais et ses auberges». Il saute en partie en août 1944, à l’initiative des FFI, qui bloquent ainsi la retraite de l’armée allemande. A Loriol, déviée par le boulevard Frédéric-Mistral depuis le début des années 70, une publicité peinte pour le nougat Canard Sauvage embellit encore aujourd'hui les murs de la ville. Cette publicité montre à l'automobiliste la proximité de Montélimar. La ville, capitale du nougat, s'annonce d'ailleurs très vite. Empruntant les boulevards circulaires autour du centre, la N7 historique ne pouvait pas absorber, les beaux jours venus, l'incessant trafic automobile des vacanciers qui s'y retrouvaient «prisonniers» d'homériques bouchons. Du coup, une aubaine pour les fabricant du précieux nougat, qui démarchaient les voyageurs jusque dans leur auto. Une pratique qui a peu à peu disparu avec la mise en service, à la fin des années soixante, de la «déviation poids lourds» puis de l’A7. Un mot sur la recette de cette spécialité (datant du XVIIe siècle) qui ne colle pas toujours aux dents (!): un mélange de sucre, de miel, d’amandes, de vanille et de blancs d’oeuf qui donne à la friandise cette texture si particulière. La ville naît, nous explique le site montelimar.fr d’une «petite bourgade appelée Acunum, l’actuel quartier d'Aygu».

Plaque de cocher de la N7 à La Coucourde (photo: Marc Verney, oct. 2008).

La RN7 historique s'extrait de Montélimar en passant par un pont sur le Roubion. Celui-ci, nous dit la Statistique du département de la Drôme, fut commencé avant la Révolution pour être livré en 1806. Un plan de 1894, archivé à la BNF et visible par le biais de Gallica montre une ancienne route de Marseille, l’actuelle D206, quittant la voie plus récente (D540A) à partir du faubourg Saint-James. C’est peut-être le chemin antique. Un autre chemin (l’actuelle D73) jusqu’à Châteauneuf-du-Rhône semble avoir aussi servi de «route royale» en direction de Donzère… Quelle difficulté de retrouver les anciens itinéraires, qui, souvent, se chevauchent, se mêlent!! Sur l’actuelle N7, voilà bientôt la commune de Malataverne; l’ancienne route impériale, puis nationale y file droit sur Donzère (D844). Mais, en 1959, une déviation de 8 km contourne désormais largement Donzère par l’Est. La chaussée frôle les premières rondeurs du Tricastin. «A l'ouest, nous raconte le Guide Bleu de la France automobile (Hachette, 1954), le voyageur remarque, au pied des Cévennes du Vivarais l'énorme front des carrières de pierre à chaux de Lafarge». Peu après Donzère, la route franchit le tout récent (on est en 1959!!) canal de dérivation de Donzère-Mondragon, gigantesque canal alimentant en «houille blanche» une vaste centrale hydraulique capable de produire près de 2 milliards de Kwh par an. Ces aménagements, réalisés peu après guerre, de 1948 à 1952 sont -à l'époque- l'une des fiertés françaises. Nous voici dans le Comtat Venaissin. Précédemment possession pontificale depuis 1274, la région est rattachée à la France le 14 septembre 1791.

A gauche, le mur publicitaire peint de Loriol, et, à droite, une "vraie-fausse" borne de la N7 vantant les mérites du nougat à la sortie sud de Montélimar (photos: Marc Verney, octobre 2008).

La route nationale 7 historique arrive à Pierrelatte, connue pour son rocher posé au milieu de la plaine, autour duquel s’est bâtie l’agglomération, ainsi protégée de la violence du mistral. Pour Cécile Jung, dans un article fort documenté sur les anciennes voies du Tricastin, la voie romaine vers Orange passe au large de cette cité et suivrait à peu de choses près le tracé rectiligne de la D458. En 1758, précise la mairie sur son site, la route principale, ancêtre de la nationale 7, passe par Pierrelatte, désormais contournée depuis 1955. Plus loin, les habitants de Lapalud (Vaucluse) peuvent, eux, dire merci aux moines qui construisirent le passage sur le Rhône à Pont-Saint-Esprit. Le pont, terminé en 1306 après 45 ans de travaux développa le bourg qui devint rapidement une zone-carrefour: échanges Languedoc-Dauphiné, pèlerins sur la route de Saint-Jacques-de-Compostelle... Car auparavant, l’ancienne chaussée du XIIe siècle évitait la région en passant vers Bollène, à l’Est. Les lieux ont longtemps été peu hospitaliers: «Autrefois, raconte le site de la mairie, la plaine de Lapalud était un immense marais, le Rhône sortait très souvent de son lit et il inondait tout»… Plus tard, nous explique le site Wikipédia, la ville est restée «très passagère après la fin des travaux de construction de la portion de route entre Lapalud et Mondragon en 1763». Lapalud, c’est aussi la production de balais liée à la culture du sorgho. Ceux-ci étaient exposés et vendus le long de la route… Un commerce qui disparaît avec la réalisation de la déviation de la nationale, en octobre 1957! Hélas, s'il y a beaucoup à dire sur l'histoire de la région, les yeux se bloquent irrémédiablement sur le «panorama» nucléaire de la centrale du Tricastin, dont les champignons de vapeurs issus des vastes aérateurs dominent les petits villages provençaux du coin. C'est la troisième usine atomique croisée depuis Lyon... La vallée du Rhône est -aussi- un vrai «couloir nucléaire».

La N7 à la hauteur du lieu-dit La Paillasse. (Photo: Marc Verney, octobre 2008).

Après La Croisée, où la R.N.7 rencontre la R.N.94 venant de Bollène à l’Est, la chaussée prend la direction de Mondragon, un bourg dévié dès 1959. A Mornas, voilà une halte de charme pour l'automobiliste qui s'est «enquillé» toute la descente de la vallée du Rhône. Le village s'est construit au pied d’un rocher à pic et assez élevé. Un des sommets surplombe même le vide de façon impressionnante. On y visite une chapelle romane et les restes de ruines féodales. En suivant le trajet ancien de la N7, le voyageur verra une ancienne borne indicatrice. Celle-ci ne mentionne, hélas, plus aucune destination. Non loin, Piolenc est un ancien bourg fortifié qui se situe un peu au nord d'Orange. Ce qui fut aussi -avec Lapalud- une «capitale du balai» a rassemblé dès 1990, quelques passionnés de la route d’antan. Ceux-ci ont fondé l’association Mémoire de la N7 dont le but était de «gérer et promouvoir» le patrimoine de cette route nationale. plusieurs expositions ont alors été réalisées avec le soutien de la population. Un musée de la N7 a même vu le jour... Peu avant de pénétrer dans Orange, la R.N.7 historique passe sur un pont la rivière d’Aigues, un cours d’eau capricieux: «Au moindre orage, ses eaux grossissent, et pour peu que la pluie continue, on l’entend mugir au loin, rouler avec fracas du gravier, renverser et détruire tout ce qu'elle rencontre», lit-on dans la Statistique du département de la Drôme de 1835... «Un premier pont de trois arches, signale le Mémoire statistique sur le département de Vaucluse (1808), est achevé en 1624 par les princes d'Orange, et portant leurs armes. Il est très élevé et très étroit. On se propose de l'élargir, s'il est vrai qu'il puisse supporter les nouveaux ouvrages qu'il faudra y ajouter pour cela; les rampes pour y arriver étaient extrêmement rapides, fatigantes, dangereuses même, elles ont été adoucies»... A gauche, arrivant tout droit du nord, la D11 pourrait être l’arrivée de la voie Agrippa Vienne-Orange.

La R.N.7 historique entre dans Orange en contournant le magnifique arc de triomphe gallo-romain, à l’origine installé au nord d’Arausio, à l’arrivée de la voie Agrippa. Celui-ci daterait de l'an 25; on peut y remarquer des scènes de combat et la commémoration d'une victoire sur un chef gaulois. Autre monument notable de la ville: le théâtre antique, bâti vers 120. A lire l'encyclopédie Wikipédia, la ville «est fondée en 35 avant JC par les vétérans de la deuxième légion gallique sous le nom de Colonia Julia Secundanorum Arausio». Le nom d'Orange est étroitement lié à des princes ayant fourni une dynastie à l'Angleterre et une famille régnant encore actuellement sur les Pays-Bas. C’est en 1731 que le rois Louis XV prend officiellement et définitivement possession de la principauté. Au sortir de la petite ville, la route nationale 7 laisse sur sa gauche la R.N.550 (D950) vers Carpentras et prend la direction d'Avignon par la plaine du Comtat en prenant l’appellation D907. A Courthézon, a été découvert le plus ancien site néolithique d’Europe. Celui-ci, nous dit Wikipédia «a été daté du VIe millénaire avant notre ère». Plus tard, «un castrum bâti par les Romains servait de défense avancée d’Orange». Après Bédarrides, la chaussée s'approche de l'Ouvèze qu'elle franchit à Sorgues, ville industrielle située aux portes de la cité des papes. Le franchissement de la rivière est réalisé dès le XIe siècle avec un ouvrage en pierre. Plus tard, indique la page de Sorgues sur l’encyclopédie Wikipédia, «le comte de Toulouse, suzerain du comté de Provence, fit ériger un castrum pour défendre ce passage». En 1808, le Mémoire statistique sur le département de Vaucluse signalait que ce pont, «fort ancien, a besoin de réparations et surtout d'être élargi et redressé pour la commodité de la route». Un nouveau pont remplace l’ancien en 1835. Aujourd’hui, Sorgues est déviée par l’ouest. En 1758, sous Louis XV, il est question, en lisant Raymond Chabert, de l’association des Etudes sorguaises (etudessorguaises.fr), de bâtir une route de la principauté d’Orange à Avignon passant par le pont de Sorgues. Jusqu’alors, certains voyageurs devaient traverser le Rhône à Pont-Saint-Esprit, aller à Tarascon, puis retraverser le fleuve en direction de Saint-Rémy-de-Provence, Orgon, Lambesc et enfin arriver à Aix. Un trajet plutôt compliqué! La décision est prise en 1772, et, nous dit Raymond Chabert, «les frais de construction étaient supportés par la principauté d’Orange jusqu’à la limite du Comtat, et, de là, jusqu’au pont de Sorgues, par Avignon».

Ancienne carte postale montrant le pont suspendu de 1894 sur la Durance. Un ouvrage détruit en 1944 durant la Seconde Guerre mondiale (auteur inconnu, source: Wikipédia).

L’entrée dans Avignon pouvait être évitée par l’automobiliste pressé, y compris dans les années cinquante: un «raccourci», la N7F, partait du Pontet pour éviter la traversée d'Avignon. On retrouvait la N7 un peu plus au sud, avant le pont de Bonpas. Un chemin que l’on discerne déjà sur la carte d’état-major du XIXe siècle consultable sur le site Géoportail de l’IGN. En 1963, la carte Michelin n°959 des Grandes routes montre un grand contournement à l’Est qui donne directement en direction du pont sur la Durance. Cette chaussée, à voie unique, sera par la suite intégrée dans l’autoroute A7. La ville d'Avignon, l'ancienne capitale du Comtat Venaissin est une ville admirable, digne d'une longue étape sur la route vers l'azur. La première chose que l'automobiliste arrivé du nord par la route de Lyon voit, ce sont les remparts. Ceux-ci entourent la ville d'une enceinte longue de quatre kilomètres et haute d’environ huit mètres. Ils ont été bâtis entre 1355 et 1372; vers 1373, on dénombrait douze portes inscrites dans des tours carrées et précédées de ponts-levis, trente-six tours et cinquante-six échauguettes. Ils ont été «magnifiquement restaurés par Viollet-le-Duc au XIXe siècle», nous glisse Thierry Dubois, dans son ouvrage C'était la Nationale 7, la Route Bleue, la Route Nationale 6... L'intérieur de la ville est tout aussi intéressant: le palais des papes, aussi bien forteresse que palais est l'un des plus majestueux exemples de l'architecture de style gothique au XIVe siècle. Non loin, le rocher des Doms est un jardin public qui domine le centre. La vue s'étend jusqu'au mont Ventoux à l'est, à la région de Châteauneuf-du-Pape au nord... En contrebas, on aperçoit les restes du pont Saint-Bénezet (premiers travaux: 1177). Les quatre arches et la chapelle que l’on peut encore voir actuellement sont les restes d’un pont qui comportait 22 arches et mesurait plus de 900 mètres de long. Le pont, souvent en butte aux crues du Rhône, souffrit constamment de la violence des flots. Il fut remanié et réparé à grands frais jusqu’en 1668. Puis on renonça à le réparer; ses arches disparurent progressivement. A la sortie d’Avignon, la D907 redevient R.N.7 avec la route de Marseille. Sur la carte IGN, on note, peu avant le pont sur la Durance, une légère inflexion de la route contemporaine par rapport au tracé du XIXe siècle. Celle-ci semble due à la réalisation de la piste de l’aérodrome d’Avignon-Caumont.

D'Avignon à Aix-en-Provence, il y a 75 kilomètres. La N7 historique file tout droit vers le pont de Bonpas, sur la Durance. Le Mémoire statistique du département du Vaucluse (1808) signale, en ces lieux, un ouvrage de bois de mélèze, achevé fin 1807. Il est «formé de 46 travées et a ainsi près de 600 m de longueur». Un premier pont, réalisé par des religieux, y existe dès le XIIe siècle. Il remplace un passage à gué, le Maupas. Mais, deux siècles plus tard, la traversée de la Durance se fait par bac… prouvant la ruine de l’ouvrage des frères pontifs. C’est un pont suspendu inauguré en 1894 qui vient relayer le fragile édifice en bois du début du XIXe. Comme souvent la guerre passe par là: l’ouvrage de 1894 saute, détruit par l’armée allemande en déroute… Le pont routier actuel date de 1954; long de 500 m, il a douze arches. Passé l'ouvrage, c'est l'entrée dans les Bouches-du-Rhône. Il faut saluer l'initiative du département: afin de ne pas perdre le souvenir de la N7, la route a été rebaptisée D7N en 2006, lors du déclassement brutal des nationales. Bon, les pastilles des panneaux indicateurs ont néanmoins viré du rouge au jaune... Un peu à côté du chemin principal, Noves (enceinte fortifiée du XIVe) et Saint-Andiol (église romane) sont des haltes bien rafraîchissantes... La route nationale 7 historique (réalisée ici fin XVIIIe) est là, encadrée par de magnifiques rangées de platanes... Ca roule tout en douceur... A lire la Statistique du département des Bouches-du-Rhône de 1826, la situation a quand même bien changé: «La route a été mise à l'entretien en 1813; depuis on n'a pu, faute de fonds, y faire toutes les réparations commandées par l'état des lieux. Sur plusieurs points elle est extrêmement rouagée et sans aucun bombement; les fossés sont comblés et les eaux restent stagnantes sur les chaussées. Dans quelques parties très étendues, notamment entre Aix et Lambesc, l'empierrement est à reconstruire»... Par là, l'automobiliste attentif du XXIe siècle aperçoit, entre les arbres centenaires, de grosses bornes blanches. On peut y lire: «Route de Jean Moulin, chemin de la liberté». Jean Moulin, le héros de la Résistance française durant la Seconde Guerre mondiale, natif de Béziers, venait en effet souvent à Saint-Andiol (où il a été baptisé). D'autre part, c'est ici, dans le petit massif des Alpilles que l'homme a commencé ses actions de combat contre l'envahisseur allemand après son parachutage de Londres. Les bornes matérialisent donc un peu la vie et les luttes de Jean Moulin dans cette région, de Saint-Andiol à Salon-de-Provence.

Après Avignon, la RN7 passe sous de véritables "cathédrales" de platanes. Un coup d'oeil magnifique à la nuit tombante (photo: EF, octobre 2008).

Au Plan-d'Orgon, la N7 d'antan croise la N99 historique Cavaillon-Nîmes. «Danger!» au carrefour , écrit le Guide Bleu 1954. Un endroit qui a été rendu «célèbre» par le film Heureux qui comme Ulysse avec l'acteur Fernandel... «Le quartier des Quatre chemins, nous dit le site de la mairie, est centré au croisement de deux axes qui, malgré le maillage des autoroutes dans notre région, restent des voies d'un grand intérêt. Il est probable que le croisement de ces deux grands axes de communication fut à l'origine de l'arrivée de Templiers à Orgon. Au XIIIe siècle, ces chevaliers du Temple entreprirent l'assèchement des zones humides de notre territoire. Des terres fertiles permirent la naissance d'une agriculture prospère. Des "mas" se construisirent. La création d'un important réseau de canaux donna la possibilité d'irriguer les différentes cultures». Après avoir passé le lieu-dit la Pierre-Plantée (anc. Pierre-Plantade), qui garde peut-être le souvenir d’une borne milliaire, la route se rapproche de la Durance. A Orgon, on ira visiter une église de 1325 qui conserve trois panneaux peints du XVIe siècle. On longe les collines du -tout- petit massif des Plaines. Jusqu’à Sénas, la route moderne (XIXe siècle) file en ligne droite, le long du canal des Alpines. On note une «ancienne route de Sénas» (D73), nettement plus sinueuse et proche de l’actuel tracé de l’A7 (bien visible sur la carte de Cassini du XVIIIe siècle).

A Sénas, la RN7 historique laisse partir sur Marseille la superbe et peu connue R.N.538 (D538) jusqu'à Salon-de-Provence. Cette longue route côtoie la N7 dans toute la vallée du Rhône à partir de Vienne. L'itinéraire est proposé par tous les guides touristiques des années cinquante car il traverse de magnifiques paysages provençaux... Au sortir de Sénas, la route d'Aix prend la direction de Lambesc en s'éloignant un peu de la Durance et en escaladant la chaîne des Côtes. Voilà le lieu-dit La Croisière, le Pont-Royal (ancien relais de poste)… Lambesc, à 8,5 kilomètres de là est aujourd'hui contournée. C’est d’ailleurs le tracé de l’ancienne voie ferrée qui sert de point de départ à la réalisation de la chaussée. Le centre de ce petit bourg est cependant intéressant, avec plusieurs hôtels particuliers de type aixois datant du XVIIe siècle. La ville, nous précise Wikipédia, «joue un rôle politique important dans l’histoire politique de la Provence: les assemblées générales des communautés du pays de Provence y siégèrent de 1646 à 1786, donnant à la cité le surnom de "Versailles aixois"». La même encyclopédie en ligne indique qu’on y «vivait surtout, entre le XVIe et le début du XIXe siècle du trafic routier. On a compté jusqu’à 20 auberges». Ici, la tragédie du 11 juin 1909, nous informe le site lambesc.fr, reste dans toutes les mémoires: «C’est le séisme le plus catastrophique qu’ait connu la France durant le XXe siècle». On a dénombré dans le village «14 victimes (46 morts au total dans la région), 50 constructions détruites et 600 autres endommagées». On sort de Lambesc par la D917 qui est la route historique. Avant Saint-Cannat, la carte d’état-major du XIXe montre un «ancien chemin de Lambesc» juste à côté de la rectiligne route nationale. Saint–Cannat, qui a aussi beaucoup souffert du séisme de 1909, est le dernier village important avant Aix-en-Provence. C'est là qu'est né Suffren (1729-1788). L'arrivée sur Aix se fait par une très longue ligne droite, protégée au nord par la chaîne de Trévaresse et bordée au sud par la vallée de la Touloubre. Encore une fois, notre regard sur la carte d’état-major du XIXe siècle publiée par l’IGN nous montre ici un «chemin de la Diligence», là, une «ancienne route de Paris» qui montrent que cette route d’Aix n’a pas toujours été si droite que cela... Des aménagements on été réalisés au cours du XVIIIe siècle.

A gauche, la N7 à Orgon, et, à droite, les imposantes bornes kilométriques de la "route Jean-Moulin" (photos: Marc Verney, octobre 2008).

Au lieu-dit Lignane, nous dit le site ciq-puyricard.org, la R.N.7 historique croise la trace d'un ancien itinéraire grec nord-sud reliant Massalia à Apt et aux Alpes par Septème et Eguilles, l'actuelle D543. Celui-ci semblerait dater du VIe siècle av. JC. En effet, avant la période romaine, c'était la colonie grecque de Massalia qui dominait la région. Aix-en-Provence n’existait pas. Au sud, à Eguilles, c'est un autre itinéraire grec qui passe dans la région, a encore écrit André Davin sur le site ciq-puyricard.org, la voie Héracléenne, dont le tracé a été repris par les Romains pour aménager la voie Aurélienne, qui dessert la colonie d'Aquae Sextiae, fondée en -123 av. JC par Sextius Calvinus. C'est -en partie- la départementale 17 d'aujourd'hui. Un peu plus loin, le lieu-dit La Calade, situé au passage de la rivière Touloubre, longtemps marécageux, a été, nous dit Wikipédia, aménagé au XVe siècle: «Il est décidé d'y construire un pont mais aussi de calader, c'est-à-dire paver en galets la dite route à chaque accès du pont, pour la rendre praticable après le retrait des eaux». On entre dans Aix-en-Provence par l’avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny et le boulevard de la République. La cité se développe rapidement durant le Haut-Empire. Une «zone cimétériale au nord-ouest de l'agglomération, le long de la voie d'Espagne (actuelle route d'Avignon)» a été mise à jour, nous annonce le Document d’évaluation du patrimoine archéologique urbain d’Aix réalisé en 1994 pour le compte du Centre national d’archéologie urbaine; ce qui montre l’ancienneté de cette chaussée… Enfin, la Cité du Livre (bibliothèque numérique) d'Aix-en-Provence garde la trace d'une enquête faite en 1844 sur une rectification projetée de la route royale n°7 entre le «col de Célony» et Aix. «Le bassin d’Aix, explique l’Histoire d’Aix-en-Provence, offre au pied de la Sainte-Victoire la seule brèche naturelle de la haute vallée de l’Arc, pour rejoindre par les bassins de l’Argens et de ses affluents la dépression périphérique des Maures: un itinéraire se dessine qui sera celui de la voie romaine avant d’être suivi par la R.N.7». Nous avons parcouru 301 km depuis Lyon.

Marc Verney, Sur ma route, novembre 2014

(*) A lire l’ouvrage Vienna: Vienne d’André Pelletier, il faut cependant noter qu’un autre itinéraire est aussi cité par les historiens pour le tracé romain Lyon-Vienne: ce compendium (ou raccourci) -puisque la voie principale passe rive droite- traverserait Solaise, où l’on a découvert une borne milliaire.

R.N.7, CONTINUER VERS LA COTE D'AZUR
On touche presque au but! Voilà la Méditerranée qui se profile, Fréjus, Cannes, Nice et Menton. La route virevolte au milieu des mimosas jusqu'à la Grande Bleue (suivre)
R.N.8, MARSEILLE ET LES CALANQUES
Une petite nationale avec un grand numéro... Ou l'inverse! La route nationale 8 historique coupe la Canebière avant de grimper vers Aubagne et Toulon. (suivre)
RETOUR VERS LYON, PARIS
Parfois, et c'est bien dommage on n'a pas le choix... Il faut rentrer chez soi... Bon, notez que c'est pour recommencer le tour aussi! Et puis on a peut-être raté quelque chose... (suivre)