Vestiges d'une borne kilométrique de la RN57 peu avant Epinal en venant de Nancy (photo: MV, avril 2012).
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Sources et documents: Atlas des grandes routes France (Michelin, 1959); Guide Bleu de la France automobile (Hachette, 1954) ; Histoire de Lorraine, par la Société lorraine des études locales dans l’enseignement public (éd. Berger-Levrault, 1939); Histoire de Metz, sous la direction de François-Yves Le Moigne (Privat, 1986); La France de l’Est et l’Europe, du Moyen-Age à nos jours, ouvrage issu du colloque organisé par l’Association inter-universitaire de l’Est, 3-4 déc. 1993, CNDP/CRDP de Lorraine (1995); Metz, 2000 ans d’histoire, sous la direction de Philippe Martin (éditions Serpenoise, 2007); Notice historique sur Scarpone et Dieulouard, par l’abbé Melnotte (imprimerie de René Vagner,1895); Pont-à-Mousson, Pierre Lallemand (éditions Pierron, 1994); www.ot-nancy.fr; www.art-et-histoire.com; Wikipédia.Remerciements: la Bibliothèque publique d'information du centre Georges-Pompidou.
Un peu d'esprit US au bord de l'ancienne RN57 à Champey-sur-Moselle (photo: MV, avril 2012).
Cette plaque de rue se trouve à Nancy (photo: MV, avril 2012).
Villes et villages traversés par la N57 historique (1959), en italique, les anciennes RN principales croisées:
Metz (N3)
Montigny-lès-Metz
Jouy-aux-Arches
Corny-sur-Moselle
Arry
Champey-sur-Moselle
Poncé
Pont-à-Mousson
Blénod
Dieulouard
Belleville
Marbache
Frouard
Pompey
Champigneulles
Maxéville
Nancy (N4, N74)
Heillecourt
Richardménil
Flavigny-sur-Moselle
Crévéchamps
Neuviller-sur-Moselle
Roville-devant-Bayon
Mangonville
Bainville
Gripport
Socourt
Charmes
Vincey
Nomexy
Igney
Thaon-les-Vosges
Chavelot
Epinal (N66, N460)
On retrouve même des traces de la RN57 sur la plaque émaillée du monument évoquant la bataille de Lorraine en 1914 (photo: MV, avril 2012).

Nos belles routes de France
R.N.57: «T'AS VOULU VOIR VESOUL …» (I)
La chanson de Jacques Brel est injuste avec Vesoul… Le centre de la ville  est coupé par la RN57 qui zigzague dans de toutes petites rues plutôt mignonnes… Mais nous venons de bien plus loin! La route nationale 57 de 1959 prend sa source à Metz, suit la Moselle jusqu’à Epinal avant de résolument prendre la direction de la Franche-Comté après Remiremont.  C’est à Besançon que se termine notre voyage de 267 km, car –en 1959- ainsi que l’atteste notre fidèle atlas des routes Michelin, c’est bien la N67 qui prenait la route de Pontarlier jusque dans les années 70. Première partie: de Metz à Epinal.

L'ancienne RN57 après Nancy en direction d'Epinal (Photo: Marc Verney, avril 2012). En cliquant sur l'image, vous continuez la promenade sur la R.N.57.

La ville de Metz, que nous avons déjà visitée lors de notre voyage sur l’ancienne nationale 3 de Paris en Allemagne est le point de départ de notre balade sur la RN57 de 1959. Le passé de la ville est prestigieux: si la colline Sainte-Croix, le site originel de la ville est fortifié dès 110 avant JC, la Metz gallo-romaine connaît un développement urbanistique fort au IIe siècle. C’est la position stratégique qui avantage l’ancienne Dividurum: lors du règne des Flaviens, peut-on lire dans l’Histoire de Metz, le limes (la frontière entre Rome et les barbares), qui court du Rhin au Danube s’appuie sur des bases arrières comme Metz qui, dès lors, jouent un rôle logistique majeur (ravitaillement des légions en grain, fourrage, produits métallurgiques, céramiques…).

R.N.3: REJOUER LES TAXIS SUR LA MARNE
La route nationale 3 relie Paris à l'Allemagne en passant par Verdun et Metz. Que des terres de batailles mais voilà, l'Est nous attire! Paysages bucoliques et vieilles pierres y sont légion...(lire)

Encore beaucoup plus tard, aux XVIIe et XVIIIe siècles, la ville de Metz reste un carrefour stratégique capital. «Metz couvre l’Etat», déclare Vauban, qui fait de cette cité le véritable pivot fortifié de la politique royale vers l’Est. Ses plans, dressés en 1676, sont exécutés entre 1728 et 1749. A l’orée du XIXe siècle, les routes en Lorraine sont bien souvent déjà tracées. En 1800, nous narre l’Histoire de la Lorraine, la région disposait de nombreuses routes rayonnant autour de Nancy, Lunéville et donc, Metz. Répondant à une logique commerciale, de grandes transversales ont été établies, comme celle des Flandres à Besançon. D’ailleurs, les livres anciens évoquent –dès 1587- un itinéraire postal partant de Metz afin de desservir Fontenoy, Pontarlier et Genève.

On quitte Metz en suivant la direction de Pont-à-Mousson (D657 en 2012). Nous voici sur la rive gauche de la Moselle, une rivière que nous allons (presque!) suivre fidèlement jusqu’à Epinal. A Jouy-aux-Arches, premier bourg d’importance rencontré sur le chemin, la route est dominée par les vestiges d’un impressionnant aqueduc romain construit à partir du IIe siècle; il alimentait en eau potable la cité de Metz. Il reste seize arches de cet ouvrage de 26 m de hauteur, et qui, à l’époque, mesurait plus d’un kilomètre de long. Ces ruines gallo-romaines nous montrent la place considérable de l’Empire romain dans la région : Jouy se trouvait également non loin du tracé de la grande voie Lyon-Metz-Trèves, un axe commercial et stratégique essentiel pour Rome.

Plaque Michelin apposée sur la rambarde du pont sur la Moselle à Pont-à-Mousson. Photo: Marc Verney, avril 2012.
Vue sur le pont de Pont-à-Mousson depuis la place Duroc. Photo: Marc Verney, avril 2012.

Nous voici maintenant aux abords de Corny-sur-Moselle. C’est dans ces parages que tombent de nombreux soldats américains et allemands en septembre 1944 lors des combats pour Metz. Le village fut d’ailleurs détruit à plus de 80% par l'armée américaine lors de dures batailles qui aboutissent à la libération de Metz le 22 novembre suivant. Après Arry, la route pénètre en Meurthe-et-Moselle.

La route s’approche de Pont-à-Mousson. Un pont sur la Moselle y est édifié dès le XIe siècle, remplaçant le passage antique de Dieulouard situé plus au sud. D’après l’ouvrage Pont-à-Mousson, le pont est élargi en 1739 par l’intendant de Lorraine La Galazière, puis sauvé de la destruction en 1814 par les habitants eux-mêmes qui enivrent le soldat chargé de la destruction! Un nouvel ouvrage est réalisé en 1925, mutilé en 1940, totalement ravagé en 1944; le pont actuel a été inauguré le 24 juillet 1949.

La cité, d’abord modeste, se développe sous la tutelle des comtes de Bar. Pont-à-Mousson est finalement rattachée au duché de Lorraine en 1480. Nous franchissons la Moselle pour nous diriger vers la belle place Duroc. Celle-ci, en triangle et bordée de maisons à arcades (XVIe-XVIIIe siècles) marque le centre de la cité. Amusant: Pont-à-Mousson est connue dans toute la France grâce… aux plaques d’égout qui portent le nom de la ville (aujourd’hui, c’est Saint-Gobain canalisations qui gère le site). Au centre-ville, le tracé de la route royale n°57 est modifié en 1847 à la faveur des travaux de construction de la ligne de chemin de fer Nancy-Metz.

On suit désormais la direction de Nancy, qui est à moins de trente kilomètres. Au sortir de Pont-à-Mousson, la route de Blénod a été réalisée de 1724 à 1728 par le comte de Hautey. Nous voici à Dieulouard. Pour le site internet du tourisme en Meurthe-et-Moselle, c’est ici que la grande voie romaine de Lyon à Trèves par Metz traversait la Moselle, obliquant vers Toul (D411). La cité, installée sur la basse terrasse alluviale de la rivière était divisée en îlots reliés par de frêles ponts de pierre et de bois. La ville a vu passer Jeanne d’Arc en 1429. D’après la Notice historique sur Scarpone et Dieulouard, la future libératrice de la France, en route pour Nancy, a suivi la voie romaine de Toul à Dieulouard pour aller prier devant la statue de Notre-Dame des Grottes. Au XVIIe siècle, placé sur les axes desservant Metz, Toul et Nancy (la forêt de Haye n’est percée pour la route Paris-Strasbourg qu’au début du XVIIIe siècle), Dieulouard a eu à subir les affres des occupations française, lorraine, allemande, suédoise…

Plaque de la RN57 à Marbache. Photo: Marc Verney, avril 2012.

A dix kilomètres de Nancy, voici Pompey. Géographiquement, nous sommes à côté du lieu où la Meurthe (qui traverse Nancy) se jette dans la Moselle. C’est là, nous dit l’encyclopédie Wikipédia que l'évêque Euchaire aurait été massacré avec 2000 chrétiens en 362. Vieille terre viticole, Pompey est surtout connu pour avoir hébergé l’aciérie qui a produit en 1887 les 8000 tonnes d’acier qui serviront à construire la Tour Eiffel. Hélas, l’activité des hauts fourneaux, commencée en 1874, s’achèvera définitivement en 1986 avec les premiers soubresauts de la crise de la sidérurgie française.

La départementale 657 entre dans Nancy par la rue de Metz (logique!). Pour le site de l’office du tourisme de Nancy, c’est «un gué sur la Meurthe –utilisé par les hommes et les bêtes-, la proximité de la giboyeuse forêt de Haye, le passage de la voie nord-sud la plus praticable et de l’axe de circulation est-ouest du sel (qui) ont certainement décidé (au XIe siècle) le duc Gérard à établir une petite place forte du nom de Nanciacum». Au XIIe siècle, Nancy devient la capitale du duché de Lorraine, relevant du Saint-Empire. Mais la cité ne profite pas de la relance du commerce, à cette époque (C’est la commune voisine de Saint-Nicolas-du-Port qui domine). Il faudra attendre la fin du XVIe siècle et la création de la Ville-Neuve de Nancy par Charles III pour que la cité prenne un nouvel essor. La ville sera rattachée à la France en 1766, après le règne du duc Stanislas Lecksinski, qui aura embelli son centre avec la réalisation de la belle place Stanislas (1752-1756).

R.N.4: ALLER REJOINDRE LES CIGOGNES
La N4 file plein est vers Strasbourg... Terres de Champagne, de Lorraine et d'Alsace, nous voilà! D'ailleurs, voilà encore un bout de macadam qui va nous rappeler des pans entiers d'histoire de France... (lire)

R.N.74: DE L'EAU DANS LE VIN...
En 1959, la route nationale 74 relie l'Allemagne à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire) en passant notamment par Sarreguemines, Nancy, Langres, Dijon, Beaune... (lire)

Dans les rues de Nancy, ce lent développement au fil du temps se ressent: en 1699, nous dit La France de l’Est et l’Europe, du Moyen-Age à nos jours, le pavé de la ville était en si mauvais état qu’il incommodait fortement les passants et «le charroi». Pour l’éclairage des rues, le duc Léopold fait placer, tous les 28,46 m, dès 1715, 250 lanternes suspendues à des cordages dans les axes les plus fréquentés. Les chandelles étaient allumées entre le 24 octobre et le 24 mars au «tintement de la cloche de guet». Pour se repérer, des noms de rues sont gravés sur les murs des maisons à partir de juillet 1736.

La ville de Nancy et sa région, dessinées sur la table d'orientation émaillée évoquant la bataille de Lorraine en 1914. Un must pour les amateurs d'histoire! Photo: Marc Verney, avril 2012.

La route nationale 57 d’antan quitte Nancy en direction de Richardménil et Flavigny-sur-Meuse. D’interminables banlieues commerciales tuent le regard, au fil de ronds-points normalisés. D’après le site art-et-histoire.com, le pont de Flavigny, qui permet à la route nationale de Metz à Besançon de franchir la Moselle a été construit en 1734. Composé de 11 arches en maçonnerie, il avait été cependant bâti sur des fondations mal stabilisées, et de nombreux affaissements se produisirent. En 1848, le projet d'un nouveau pont en maçonnerie de 6 arches en anse de panier est présenté. Lors des combats pour la libération de Nancy en 1944, des destructions intervinrent sur cet ouvrage.

Lorsque le duc Stanislas s’établit à Lunéville en avril 1737, il souhaite l’établissement de liens postaux avec le sud des Vosges. Ces créations coïncident, nous narre L’Histoire des postes en Lorraine, avec l’achèvement, aux environs de 1758 d’une nouvelle chaussée entre Nancy et Charmes. Celle-ci, en remplaçant des chemins trop sensibles aux crues, permet la transmission de nouvelles jusqu’à Plombières-les-Bains en transitant par les relais de Flavigny, Roville-devant-Bayon, Charmes, Igney, Xertigny.

Gros plan sur une plaque indicatrice à Nomexy. Photo: Marc Verney, avril 2012.
Une autre plaque de cocher à Charmes. Photo: Marc Verney, avril 2012.

La petite ville de Charmes est atteinte après avoir parcouru une trentaine de kilomètres sur la D570. L’ancienne nationale est vide, avec peu de trafic, car il existe désormais une voie rapide entre Nancy et Epinal. Là, dans les environs, s’est déroulée la bataille de la trouée de Charmes au début de la Première Guerre mondiale , du 24 au 26 août 1914 . Peu connue, elle s'est achevée par une victoire de la IIe armée française, aux ordres du général de Castelnau, sur la VIe Armée allemande de Rupprecht de Bavière. Un monument spectaculaire, situé sur une butte dominant la ville retrace, avec force détails, les péripéties de ce combat qui a sauvé Nancy de l’occupation allemande.

La route poursuit son chemin le long de la Moselle. Il reste une vingtaine de kilomètres à parcourir jusqu’à Epinal, terme de notre première étape.
(continuer la promenade)

R.N.66: DE BAR A BALE
La route nationale 66 historique de 1959 relie simplement Bar-le-Duc en Lorraine à Bâle, aux portes du Jura suisse. Une belle promenade à faire en toutes saisons (lire)

R.N.460: VOSGES SUR SAONE
En 1959, la R.N.460 relie Dijon à Epinal en passant par Champlitte, Bourbonne-les-Bains et Darney, soit 170 kilomètres d’une belle chaussée ondulante (lire)

Marc Verney, Sur ma route, juin 2012
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