Sources et documents: Atlas des grandes routes de France (carte Michelin, 1959); carte Michelin Verdun-Wissembourg n°57 (1939, 1949); carte IGN Metz-Verdun-Luxembourg n°111 (2010); C’était hier, Saint-Avold, C. Reiser, F. Bauer, D. Metzger, éd. Serpenoise (1988); Dictionnaire Napoléon, Jean Tulard, Fayard (1987); Dictionnaire topographique, historique et étymologique des rues, places, ponts et quais de la ville de Metz, F.M. Chabert (1878); Guide Bleu de la France automobile (Hachette, 1954); Guide du Routard Lorraine (Hachette, 2013); Guide pittoresque du voyageur en France TIII, Firmin Didot frères (1823); Histoire de Metz, René Bour, éd. Serpenoise (1990); Histoire des Postes en Lorraine, Gilberte Laumon (Presses universitaires de Nancy, 1989); Histoire des route de France du Moyen-Age à la Révolution, Georges Reverdy (Presses de l’ENPC, 1997); Histoire de Verdun, sous la direction d’Alain Girardot (Privat, 1982); Le Ban-Saint-Martin, François Jung, éd. Serpenoise (2009); Les bases américaines en France: 1950-1967, Olivier Pottier (éd. L’Harmattan, 2003); Longeville-lès-Metz, Alain Gatti, éd. Serpenoise (1986); Notice sur le pays de la Sarre, et en particulier sur Sarreguemines et ses environs, N. Box, impr. de Beha (1887, 1899); Saint-Avold, par l’abbé Albert Meyer, impr. Léon-Louis (1997); Verdun aujourd’hui, 1946-1978, Gérard Domange (Dossiers documentaires meusiens, 1979); Verdun, 2000 ans d’histoire, Paul Gauny, Marc Rochette, Gérard Domange (Connaissance de la Meuse, 1999); Verdun et ses champs de bataille, Alain Denizot (Nouvelles éditions latines, 1972); ban-saint-martin.fr; freyming-merlebach.fr; hannonville.suzemont.free.fr; verdun.over-blog.net; Wikipédia, Wikisara. Remerciements particuliers: la bibliothèque municipale de Verdun et Mme Lakhdar-Kreuwen; les archives municipales de Saint-Avold.
Localités traversées par la N3 (1959): Verdun (N18, N64 ) Haudiomont Manheulles Pintheville Maizeray Harville Labeuville Hannonville-Suzémont Mars-la-Tour (N52bis) Vionville Rezonville Gravelotte Rozérieulles Maison-Neuve Moulins-lès-Metz Longeville-lès-Metz Ban-Saint-Martin Metz (N53, N55, N57) Montoy-Flanville Landremont Pont-à-Chaussy Courcelles-Chaussy Bionville Fouligny Marange Longeville-lès-St-Avold Saint-Avold (N3A) Moulin-Neuf Hombourg Freyming-Merlebach Rosbruck Morsbach Forbach Stiring-Wendel La Brême d'Or (Allemagne)
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Belles
routes de France...
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L’histoire de Verdun s’est souvent –et tragiquement- confondue avec la grande épopée européenne. En effet, «implantée au carrefour de la vallée de la Meuse et des routes qui relient l’Argonne à la Woëvre», nous rappelle l’ouvrage Histoire de Verdun, la ville est «un site défensif où, depuis les origines, les hommes ont eu tendance à venir se réfugier». La cité (Virodunum) est donc mentionnée dès le IIIe siècle par l’Itinéraire d’Antonin comme étant placée sur la route de Reims (Durocortorum) à Metz (Divodurum). On sait aussi que les Romains fortifient les lieux, sur la partie est d’un promontoire dominant la Scance et la Meuse (Verdun, 2000 ans d’histoire). Dans ce dernier ouvrage, on apprend également que c’est ici que les petit-fils de Charlemagne se partagent (après la bataille de Fontenoy-en-Puisaye) l’Empire carolingien en août 843. Une division qui va durablement influencer la vie en Europe puisqu’elle entérine deux entités majeures: le royaume de France à l’ouest et l’Empire germanique à l’est… Plus tard en 1552, et même si les territoires des Trois Evêchés (Metz, Toul et Verdun) sont rattachés au royaume français, la cité verdunoise voit sa fonction militaire s’accroître. Dès 1624, on y construit une citadelle alors que Vauban fait réaliser alentours d’innombrables travaux de fortification. A tel point que les habitants resteront enfermés derrière leurs anciens murs jusqu’à la veille du premier conflit mondial… Verdun n’a d’ailleurs, depuis le déclin de l’axe mosan au XIVe siècle (supplanté par le Rhin et les foires champenoises), plus qu’un rôle commercial secondaire. La fonction militaire sera, dès lors, prépondérante: en 1792, la ville, aux fortifications inachevées, se rend pourtant rapidement aux forces anti-révolutionnaires, provoquant une violente émotion à Paris. Plus tard, de 1881 à 1914, après le traumatisme de la guerre de 1870, le nombre de soldats cantonnés entre Scance et Meuse passe de 3000 à 7000. En 1914, la place-forte de Verdun compte 19 forts et 19 ouvrages en deux ceintures. On se prépare à la revanche, qui viendra bientôt ravager la cité et ses environs. Entre le 5 et le 10 septembre de cette année, Verdun résiste face aux Allemands pendant la première bataille de la Marne puis, après deux années d’attaques et de contre-attaques, c’est l’affrontement majeur. Le 21 février 1916, les troupes allemandes écrasent les Français sous un déluge d’obus. Mais, malgré les succès initiaux, la bataille s’enlise dans des affrontements effroyablement meurtriers. Et puis, finalement, «en deux offensives, les 24 octobre et 15 décembre», lit-on dans Verdun et ses champs de bataille, l’armée française atteint les lignes de février 1916, «mettant Verdun et ses forts à l’abri». Bilan horrible de cette véritable boucherie: 363 000 tués et blessés côté français; 336 000 côté allemand (source: Larousse)… Dans Verdun, 2000 ans d’histoire, on découvre que, durant la Première Guerre mondiale, c’est un quart de la ville qui est détruit par les bombardements. Un tourisme-hommage se développe alors: Michelin édite dès 1919 un guide des champs de bataille et deux ans auparavant (en plein conflit), le Bulletin meusien propose déjà de reconstruire entièrement Verdun en laissant telles quelles les ruines du champ de bataille… Mais la cité martyrisée n’en avait pas encore fini avec la chose militaire: libérée en août 1944 par la 7e DB américaine, la ville voit s’installer dès le début des années cinquante (jusqu’en 1967) plus de deux mille soldats US chargés d’opérer le QG de l’Advance Section de l’Otan (logistique). Dans la cité meusienne, lit-on dans Verdun aujourd’hui, 1946-1978, «on se souvient que ce sont les Américains qui ont transporté de Paris les statues des maréchaux, aplani le terrain marécageux de la Galavaude et participé à la création de l’immense parking de Douaumont».
Après la guerre 14-18, les voies de communication sont refaites dans la ville: le tracé de la R.N.3 est fixé par l’avenue de la Gare, les rues Saint-Paul, Mazel, Saint-Sauveur et Saint-Victor. Ces deux dernières rues empruntant aussi l’ancien itinéraire romain en direction de Metz, nous signale l’Histoire de Verdun. La Meuse est franchie par le pont Sainte-Croix. Ou Fernand-Legay, en hommage au résistant qui réussit, le 30 août 1944, à désamorcer une bombe allemande placée sous le pont jouxtant la place, seul ouvrage praticable par les blindés de l'armée Patton (tourisme-verdun.com). Construit au Moyen Age, c’est le point de passage sur la Meuse le plus ancien de la ville (rebâti en pierres de 1782 à 1785 dit enlorraine.unblog.fr) malgré son apparence moderne d’aujourd’hui. Au XVIIIe siècle, «sur la rive droite, il fut allongé de cinq mètres pour permettre plus d'écoulement d'eau en cas de débordement», dit Jules Simon, dans l'Histoire de la ville de Verdun (T1). La R.N.3 de 1959 quitte Verdun par la rue de Metz en direction du Pont-de-Belrupt. Puis, notre véhicule longe le fort du Rozelier. Lorsqu'on visite aujourd'hui les alentours paisibles et boisés de la ville, on a du mal à imaginer l'enfer qu'ont pu vivre les combattants des deux bords durant la bataille de 300 jours, entre février et décembre 1916... et pourtant, une visite sur le site de l'ossuaire de Douaumont remet bien vite les pendules à l'heure: l'émotion monte, impossible à maîtriser, à la vue des 15 000 croix qui s'alignent à perte de vue sur le vert gazon. Entre Verdun et Metz, la R.N.3 n'a pas toujours emprunté l'itinéraire par Etain, Conflans-en-Jarnisy et Doncourt-les-Conflans (D603 aujourd’hui). En 1959, la nationale 3 passe par Manheulles, Mars-la-Tour, Vionville et Razonville (c’est la R.N.18 qui file vers Etain à l’époque). La route, nous raconte le Guide Bleu de la France automobile 1954, après la traversée des côtes de Meuse, descend «dans la plaine de Woëvre, au sol marneux et fertile, parsemée d’étangs et de bois. On traverse de nombreux villages». Itinéraire intéressant puisqu’il s’agit là, nous dit l’Histoire des routes de France du Moyen-Age à la Révolution d’une ancienne chaussée négociée par Mazarin pour Louis XIV au travers de ces régions de l’Est afin que la France puisse rejoindre ses terres alsaciennes. Construite à la fin du XVIIe siècle, cette voie atteint –après Metz- la ville de Sarrebourg et le col de Saverne; en Lorraine, autour du chemin, une bande d’une lieue et demi de largeur est également acquise à la France. Entre Manheulles, Hannonville-Suzémont (amélioration de la traverse en 1863 avec trottoirs et pavés), Gravelotte, la voie d’aujourd’hui (D903) suit également l’itinéraire antique qui se dirige vers Metz (les historiens le placent un peu au nord du tracé d’aujourd’hui). Une chaussée sans doute construite en 97 après JC sous l'empereur Nerva et connue sous le nom de via Verdunensis d’après le site hannonville.suzemont.free.fr. On voit en tous cas un tracé bien net sur la carte de Cassini (XVIIIe) publiée par l’IGN, ponctué de nombreux relais de poste à Manheulles, Harville, Mars-la-Tour, Gravelotte.
De 1871 à 1919, la frontière de la France avec l’Allemagne est ici, juste après Mars-la-Tour (en effet, le traité de Francfort –10 mai 1871- donne l’Alsace et la quasi totalité de la Moselle à l’Allemagne). Sous domination allemande, la route se dénomme ici à l’époque Staatsstrasse Nr.14, «de Paris à Metz». Plus tard, en automne 1945, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, dans son rapport annuel, le Conseil général de la Moselle (redevenue définitivement française) note l’état désastreux des routes du département en raison de l’absence d’entretien durant l’occupation, des «trous d’obus et de bombes» causés par les combats de la Libération et de la circulation militaire américaine intensive, notamment «pendant la période de dégel de février 1945»… Les départementales 903 et 603 se rejoignent à Gravelotte, site d'une célèbre et meurtrière bataille de la guerre de 1870 (d'où l'expression «ça tombe comme à Gravelotte»). Car les pertes sont lourdes: 12.000 morts ou disparus côté français, 19.000 côté allemand. Cette défaite française marque surtout le début de l'encerclement des troupes de l'armée Bazaine et la rapide déconfiture du Second Empire. La voie, nous décrit le Guide Bleu de la France automobile, «descend, sinueuse, dans la vallée de la Moselle». La route moderne, rectifiée au début des années trente aborde le bourg de Rozérieulles sous le nom de rue de Paris. Sur l’Atlas de Trudaine pour la généralité de Metz (XVIIIe siècle) on voit très clairement une autre route, dénommée «ancienne chaussée», passer au nord de Rozérieulles. En 1738, signalent les Mémoires de l'académie impériale de Metz, on projette «deux passages pour franchir la côte de Rozérieulles». Dès 1746, «c’est le commencement des travaux de la côte actuelle par le second tracé du projet de 1738» (à gauche du village). En 1839, on élargit le lacet de la côte. Puis, en 1840, on reconstruit «en quartzite de Sierck», des chaussées pavées dans les traverses de Moulins et de Longeville. De 1841 à 1849, de grosses réparations sont pointées sur cette partie de route par suite de l'augmentation de la fréquentation. Et, en 1854, c’est la réalisation d’une déviation de la route à la sortie de Longeville et avant d'entrer à Metz, par suite du tracé du chemin de fer de Metz à Thionville. Au sud du village de Moulins-lès-Metz, il y avait une ancienne boucle de la Moselle, comblée depuis le XVIIe siècle. Reste là un majestueux vieux pont du XIIIe siècle à onze arches de 174 m de long, qui, désormais, franchit une belle prairie verte… La route de Paris à l’Allemagne, elle, continue tout droit vers Longeville-lès-Metz. «L’histoire de la ville, nous explique Wikipédia, remonte à l’époque gallo-romaine où Longa-Villa est traversée par une voie antique». En effet, nous confirme l’ouvrage Longeville-lès-Metz, les lieux abritaient, à l’époque, «un petit hameau, peuplé de vignerons», traversé par la chaussée de Reims. Cette route sera longtemps d’entretien difficile en raison de la proximité de la rivière. En 1807 d’ailleurs, seule la Grand-Rue est bâtie.
A quelques longueurs de là, c’est le lieu-dit La Plaine, sur la commune du Ban-Saint-Martin, qui voit passer la route de Verdun. Les rues de ce bourg, précise le site de la mairie, sont goudronnées et pourvues d’éclairage électrique en 1925. A côté, dans l’ancienne annexe de la commune de Devant-les-Ponts, Le Sauvage, se trouvait au début du XIXe siècle, nous signale l’ouvrage Le Ban-Saint-Martin, une auberge qui recueillait les voyageurs arrivés après la fermeture de la porte de France à Metz. Après des abords particulièrement décevants: voies rapides, banlieues grises... le coeur de Metz est beaucoup plus excitant. Après le pont sur la Moselle canalisée et la rue de Paris, on passe le pont des Morts sur le bras principal de la rivière. «Dès le début du Moyen-âge, raconte le site tout-metz.com, on a déjà un pont en bois à cet endroit». Aujourd’hui, l'ouvrage est fait de pierre et date du XVe siècle avec des reconstructions et renforcements permanents tout au long de sa vie. Son histoire est singulière: il a été, dit-on, financé par un impôt, comme son nom l’indique, sur les décès. A chaque nouveau mort, l’hôpital Saint-Nicolas revendait le meilleur habit du défunt, ce qui dégageait de l’argent pour la maintenance de l’ouvrage… Un peu plus loin, sur le bras aval de la Moselle, «le moyen pont des Morts souvent abrégé en Moyen Pont fut un ouvrage fortifié. Il est construit entre 1282 et 1313», écrit Wikipédia, et était, à l’origine, protégé par un château bâti vers le IXe siècle, restauré au XVe siècle puis démoli vers 1740. Entourée d'un écrin de verdure, au bord de la Moselle, la magnifique cathédrale Saint-Etienne, surnommée la «lanterne de dieu» domine une vieille cité de pierre blonde. On doit, nous raconte l’Histoire de Metz (éd. Serpenoise), les débuts de la ville à la tribu gauloise des Médiomatriques qui établit là un oppidum au croisement des principaux itinéraires routiers de la tribu. Les Romains font, eux aussi, de ces lieux un important carrefour routier. A Divodurum, deux voies se croisent au confluent de la Seille et de la Moselle: l’une joint les régions du Sud aux territoires militaires rhénans, l’autre relie Reims à Strasbourg. Cette dernière est dédoublée –depuis Metz- par une voie reliant Mayence par la Sarre (il s’agit de notre R.N.3 historique).
Au IVe siècle, la cité se ceint de murs, ce qui ne l’empêche pas d’être ravagée par Attila en avril 451. Relevée de ses ruines, Metz fait partie de l'Empire franc et devint, à la mort de Clovis, en 511, la capitale et la résidence royale de l'Austrasie. En 843, la cité revient à Lothaire par le traité de Verdun. Par la suite, elle devient la capitale de son royaume auquel est donné le nom de Lotharingie (la Lorraine!). Aux XIIe et XIIIe siècles, nous narre l’Histoire de Metz (éd. Privat), Metz, avec plus de 25 000 habitants, est la principale agglomération régionale. La ville est alors le chef-lieu d’un évêché puissant. De nombreux ponts, franchissant la Moselle et la Seille sont bâtis entre 1200 et 1250. Le pont des Morts –prolongé par le Moyen-Pont- porte, sur la Moselle, la route de Paris à l’Allemagne. Celui-ci, construit en bois en 1267, puis en pierre de 1282 à 1343 (restauré en 1813-1847) est précédé par la rue de Paris, un quartier bâti en 1731 sur un terrain laissé libre par des fortifications. Reconnue rattachée au royaume de France en 1648 par le traité de Westphalie, Metz va subir de nombreuses transformations au XVIIIe siècle. Le duc de Belle-Isle, gouverneur, va initier de nombreux projets, dont l’assèchement d’îles sur la Moselle (île du Saulcy), la création de rues et de ponts et l’aménagement d’une place centrale, la place d’Armes (1771). A l’époque, la ville de Metz reste un carrefour stratégique capital. «Metz couvre l’Etat», dit Vauban, qui fait de cette cité le véritable pivot fortifié de la politique royale vers l’Est. Ses plans, dressés en 1676, sont exécutés entre 1728 et 1749. Au XIXe siècle, Metz est la place-forte la plus imposante d’Europe. On y compte 150 bâtiments militaires et une garnison forte de 10 000 hommes. Au temps des diligences, c’est la place de Chambre qui se trouvait au cœur du trafic routier: les voitures partent pour Paris (neuf départs par jour), Strasbourg, Bruxelles, Mayence… En juillet 1850, l’arrivée du train fait s’effondrer toute cette activité. C'est la présence allemande qui va donner à Metz son cachet unique: la Moselle, annexée après l'effondrement du Second Empire, est marquée à partir de 1900 par une profonde germanisation de l'architecture dans des paysages urbains rénovés. Sur des terrains (40 ha) dégagés des anciennes fortifications Vauban, l'architecture officielle des nouveaux maîtres entend manifester par des références stylistiques typiquement allemandes, néo-roman, néo-renaissance ou néo-baroque rhénan, l'appartenance au IIe Reich. Casernes, bâtiments postaux, immeubles de rapport illustrent la nouvelle réalité. Et c’est la gare de Metz, construite de 1904 à 1908 par l'architecte berlinois Kröger, qui symbolise plus particulièrement la puissance et le centralisme du jeune Empire allemand... Fin 1944, la ville et ses environs seront le théâtre de violents combats entre troupes américaines et allemandes.
On sort de Metz en longeant la porte des Allemands, plantée sur la Seille. Elle doit son nom à un hôpital créé par des chevaliers de l’ordre teutonique au XIIIe siècle. Le bâtiment est détruit lors du siège –raté- de Charles-Quint en 1552 qui voulait reprendre la ville aux Français. «En 1752, rappellent les Mémoires de l'académie impériale de Metz, la route, entre la porte des Allemands à Metz, et la route de Saarlouis aux Bordes, n'existait pas. Ce n'est que de 1784 à 1787 que la route a pris son origine à Metz». Aujourd’hui, on ne se pose plus ce genre de questions, voici la voie Valéry-Giscard-d’Estaing (ancienne voie rapide-Est)… Dans ces faubourgs, l’ancienne R.N.3 suit les boulevards de l’Europe et du Général-Metman. La chaussée prend maintenant la direction de la région des rivières Nied (Française et Allemande). Là, nous dit l’Histoire des routes de France du Moyen-Age à la Révolution, c’est en 1784 que l’on commence à réfléchir à l’amélioration de la voie. D’après le site silly-sur-nied.fr, la route, devenue impériale, (qui porte le n°4 jusqu’en 1824 puisqu’il existait alors une RI3 de Paris à Hanovre par Maastricht) va faire l'objet d'importants travaux en 1806 à la demande de l'empereur Napoléon en raison de son importance stratégique. Elle est devenue aujourd'hui la RD603 qui passe à Landremont. Sur le territoire de la commune de Montoy-Flanville, nous dit Wikipédia, «la suppression des virages dangereux de la Planchette en 1994 permit de mettre à jour une portion de la voie romaine allant de Metz à Mayence». Mais après, la voie romaine de Metz à Mayence passait plus au nord, traversait Narbefontaine et Boucheporn. On peut encore suivre son tracé au nord de l’autoroute A4. Au lieu-dit de Pont-à-Chaussy, la route nationale 3 historique traverse la Nied française (un pont en bois est notamment construit en 1743-1744). Plus tard, disent les Mémoires de l'académie impériale de Metz, on y construit «de 1774 à 1781», un nouvel ouvrage composé de trois arches en pierre de taille. A quelques hectomètres, voilà Courcelles-Chaussy. Ici, précisent les Mémoires de l'académie impériale de Metz , la route a été restaurée dès 1813. Une ancienne voie, plus loin, semble passer, d’après l’Atlas de Trudaine, par Plappecourt, Raville et Fouligny. «Le pont de Bionville, sur la rivière de Nied allemande a été construit en 1769. Il est composé aussi de trois arches en pierre», indiquent encore les Mémoires de l'académie impériale de Metz. C’est là que passait la chaussée du XIXe siècle. Les études, pour adoucir la côte de Longeville, sont entamées dès 1811. Après Longeville-lès-Saint-Avold, on découvre, dans le compte-rendu (mis en ligne) d’un exposé d’Henri Hiegel, archiviste municipal de Sarreguemines et membre de l'Académie de Metz, qu’un ancien itinéraire du début du XVIIe siècle faisait passer la route d’Allemagne par l’Hôpital (au nord de Saint-Avold). L’itinéraire secondaire, qui, lui, traversait Saint-Avold pour des raisons commerciales a fini par être celui de la R.N.3 historique (l’ouvrage Saint-Avold fait, lui, partir cet ancien itinéraire nord par la route de Carling jusqu’à hauteur du Felsberg). L’entrée dans Saint-Avold se fait par un faubourg créé au XVIIIe siècle. La ville, elle-même, date du VIIIe siècle, date à laquelle les reliques de saint Nabor sont ramenées de Rome. L’ouvrage Saint-Avold précise qu’en 1740, un voyage vers Paris durait une dizaine de jours; la poste aux chevaux de la cité comptait une vingtaine de chevaux et, en 1681, six auberges se partageaient la clientèle des voyageurs. «En état désastreux après la guerre de Trente ans, nous dit le livre, la route Paris-Metz-Sarrebruck a été remise en état dès la fin du XVIIe siècle». Grand chamboulement au milieu du XIXe siècle: l’ouverture de la ligne de chemin de fer de Metz à Saint-Avold en 1851, puis celle de Saint-Avold à Forbach puis Sarrebruck en 1852, ainsi que la découverte de charbon à Carling avec l’ouverture du puits Max en 1862, va durablement asseoir la prospérité de la ville. Un premier contournement routier de Saint-Avold par le boulevard de Lorraine daterait du début du XIXe siècle.
La route qui va de Moulin-Neuf à Merlebach date, d’après l’ouvrage Saint-Avold, de 1811. «A partir du Moulin-Neuf, nous dit la Notice sur le pays de la Sarre, et en particulier sur Sarreguemines et ses environs, la vallée de la Rosselle prend un aspect exceptionnel et semble vouloir compléter la série des promenades qui font la réputation de la banlieue de Saint-Avold. Elle est à peine assez large pour livrer passage au cours d'eau, à la route nationale et au chemin de fer qui le côtoient le long d'une mince bande de prairie...». Un peu auparavant, à la fin 1803, les ponts et chaussées du département de la Moselle tentent la relance des travaux entre Merlebach et la frontière allemande: «Le tracé nouveau de la route suivra le tracé du chemin actuel dont les sinuosités seront réglées par des courbes plus régulières». Merlebach, nous raconte le site internet de la ville, «n’a pas été épargnée par les fléaux de la guerre: c’est ainsi que le hameau mis à feu et à sang par les suédois en 1637, ne comptait plus que 80 habitants à la fin du "tragique XVIIe siècle"». Ici, la voie romaine Metz-Mayence se confond avec la frontière France-Allemagne. Juste après Freyming-Merlebach, peu avant Rosbruck, cette frontière est d’ailleurs si proche que de l'autre côté du trottoir se succèdent, au début des années 2000, bars louches et discothèques-casinos autorisés outre-Rhin... Ambiance camionneurs assurée malgré le réaménagement paysager récent de la route. Rosbruck est possédée au XIIIe siècle par les comtes de Sarrebruck qui y assurent la protection des marchands et des gens de passage sur la route de Metz; ils y installent un péage autour du pont en bois sur la Rosselle. L’exploitation intensive du charbon marque Rosbruck: de nombreuses maisons s’y sont affaissées en raison de sols fragilisés par les galeries de mine. L’achèvement du revêtement en tarmacadam de la R.N.3 entre Merlebach et Forbach est projeté dans les années trente. La ville de Forbach (pavée de 1838 à 1840) se situe dans la dépression du Warndt, au milieu d’un espace fortement urbanisé et industrialisé. Dès le milieu du XIXe siècle, trois grandes familles marquent l’essor industriel de la région et influencent la vie politique, économique et sociale: les Wendel (industrie houillère et sidérurgie), les Couturier (tuileries) et les Adt (cartonneries). Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, la création des Houillères du bassin de Lorraine va créer plusieurs années de forte prospérité.
Passé Stiring-Wendel, à Spicheren, la frontière n'est plus du tout matérialisée... Restent, du côté allemand, les panneaux jaunes indiquant la direction de Saarbrücken, capitale de la Sarre. Paris est à 390 km. Le lieu s’appelle aussi –fort joliment- la Brême d’or. C’était, lit-on dans la Notice sur le pays de la Sarre, et en particulier sur Sarreguemines et ses environs, le nom d’une auberge accueillant les voyageurs sur la route de Metz. Quand, en 1837, la princesse Hélène de Mecklembourg fait son entrée en France pour devenir la femme du duc d'Orléans, on a décoré la route et la dite auberge de genêts en fleur, nimbant la région d’une belle couleur jaune. La princesse a été émerveillée et il a fallu que l'expression «die schöne goldene Breme» tombe de ses lèvres pour rester attachée au lieu et à l'auberge… Nous n’en avons pas tout à fait fini avec la route d’Allemagne! La voie vers Mayence, nous indique le Dictionnaire Napoléon, fait l’objet du «constant intérêt de Napoléon Ier».A l’époque, Mayence est le chef-lieu du département du Mont-Tonnerre et les travaux de réalisation de la chaussée se déroulent entre 1806 et 1811. D’ailleurs, mentionnent les Mémoires de l'académie impériale de Metz, «un crédit exceptionnel est accordé pour les travaux sur cette portion de route lors du passage en 1807 de l’Empereur». Marc Verney, Sur ma route, octobre 2024
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