On remarque le tracé de la R.N.444 historique autour d'Avallon sur ce panneau Michelin de l'autoroute A6 situé sur l'aire de repos de Montmorency (photo: MV, août 2014).
Entrée de la forêt d'Aumont. A côté de ce panneau se trouvent de grandes colonnes, sans doute les anciens "guidons" de cette vaste étendue d'arbres (photo: Marc Verney, mai 2021).
AUX LECTEURS: les textes, photos et dessins de ce site sont soumis au droit d'auteur. Pour toute autre utilisation, contacter l'auteur de Sur ma route. Merci de votre compréhension...
Après Prusy (photo: MV, mai 2021).
Borne de limites départementales entre Aube et Yonne (photo: MV, mai 2021).
Avant Avallon (photo: MV, mai 2021).
SOURCES ET DOCUMENTS: Atlas des grandes routes de France, Michelin (1959); carte n°61 Paris-Chaumont, Michelin (1941); carte n°65 Auxerre-Dijon, Michelin (1955); Annale des ponts et chaussées, tome IX, Dunod, éditeur (1869); Bulletin des lois de l'Empire français, Imprimerie impériale (1813); Bulletin des lois de la République française, Imprimerie nationale (1874); Bulletin des lois du Royaume de France, Imprimerie royale (1829); Dictionnaire géographique, historique, administratif, industriel et commercial de toutes les communes de la France, A. Girault de Saint Fargeau, Firmin-Didot (1844); Guide Bleu Bourgogne-Lyonnais, Hachette (1965); Histoire de Troyes et de la Champagne méridionale, T. Boutiot, Dufey-Robert libraire (1874); Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 (Aube), M. d'Arbois de Jubainville, imprimerie administrative de J. Brunard (1864); Itinéraire général de la France, Jura et Alpes françaises, Adolphe Joanne, librairie Hachette et Cie (1877); «Les voies antiques de l'avallonnais, apports de l'histoire et de l'archéologie», Pierre Nouvel, Bulletin de la Société d'études d'Avallon (2007); Mémoire et compte rendu des travaux de la société des ingénieurs civils (1882); «Tonnerre: les travaux se terminent sur le pont qui franchit l’Armançon par la D944», l'Yonne républicaine (10 novembre 2018); chaource.fr; nievre-tourisme.com; patrimoinedumorvan.org; plusbeauxdetours.com; seinegrandslacs.fr; tonnerre-patrimoine.com; tourisme-serein.fr; vins-bourgogne.fr; Wikipédia; Wikisara; le Géoportail de l’IGN.
Il existe un itinéraire touristique autour du lac de Pannecière (photo: Marc Verney, mai 2021).
VILLES ET VILLAGES traversés par la R.N.444 historique (1959), en italique, les anciennes RN principales croisées:
Buchères (N71)
Roche
Les Bordes-Aumont
Chaource
Cussangy
Vallières
Prusy
Coussegrey
Tonnerre (N5, N65)
Yrouerre
Sainte-Vertu
Nitry
Joux-la-Ville
Puit-d'Edme
Lucy-le-Bois
Avallon (N6)
Cousin-la-Roche
Chastellux
Lormes
Vauclaix (N77bis)
Chassy
L'Huis-Picard
Château-Chinon (N78)
A VOIR, A FAIRE
Troyes: la ville est un but de visite à elle toute seule. Tout le centre historique (XVIe siècle) mérite le détour. Nombreuses et bien restaurées maisons à pans de bois. Mais aussi le musée des Beaux-Arts et d’Archéologie, la Maison de l’Outil et de la Pensée ouvrière, le musée d’Art moderne, la Cité du Vitrail, les musées de Vauluisant (art champenois et histoire de la bonneterie), la cathédrale Saint-Pierre-Saint-Paul, la basilique Saint-Urbain, l’église Sainte-Madeleine…
Chaource: un village connu pour son fromage –déjà dégusté à l’époque de Philippe le Bel, et pour son église (XIIIe, XVIe) qui recèle une Mise au tombeau magnifique, réalisée en 1515 par un artiste anonyme. Quand il est ouvert, on peut donc visiter aussi le musée du Fromage, situé face à l’église.
Tonnerre: l’hôtel-dieu fondé en 1293 par Marguerite de Bourgogne (vaste salle des malades, 90 m de long!), l’hôtel d’Uzès (Renaissance), la fosse Dionne, source abondante entourée d’un lavoir circulaire du XVIIIe siècle. Par le chemin des Roches, on accède à l’église Saint-Pierre (panorama sur la ville). Autour de la ville, les vignobles du tonnerrois, dont Epineuil et Molosmes.
Avallon: quelques rues anciennes bien restaurées avec de belles maisons anciennes, la tour de l’Horloge, la collégiale Saint-Lazare… On peut faire aussi un petit tour sur les anciens remparts, dominant la bucolique vallée du Cousin (pique-nique conseillé aux beau jours!). On trouve également à Avallon, un émouvant musée du Costume. A quelques kilomètres, ne pas manquer la visite de la basilique et du village de Vézelay, sur sa charmante colline.
Chastellux-sur-Cure: dominant la petite rivière, sur son éperon, ses huit tours et sa silhouette élégante ne peuvent se rater… Visite des jardins (gratuit) et du logis (payant, aux beaux jours).
L’Huis-Raquin: le lac-réservoir du Crescent (pêche, baignade non surveillée).
Vésigneux: le château.
Lormes: l’église Saint-Alban et les promenades dans les gorges de Narvau (à 300 m du centre-ville).
L’Huis-Picard: le lac-réservoir de Pannecière (pêche, baignade et promenades).
Château-Chinon: l’office du tourisme propose de nombreuses balades pédestres dans le Haut-Morvan. Sinon, beaucoup de choses tournent autour de l’ancien président François Mitterrand, un circuit, le musée du Septennat (réouverture printemps 2023), la fontaine monumentale de Niki de Saint-Phalle.
L'arrivée à Château-Chinon (photo: MV, mai 2021).
AUTRES RESSOURCES sur la R.N.444 historique:
La page Wikisara
L'encyclopédie en ligne Wikipédia


Jolies routes de Bourgogne
[DETOUR D'ETE] R.N.444: LA BELLE MORVANDELLE...
Créée administrativement dans les années trente, la R.N.444 historique relie Troyes à Château-Chinon en passant par Chaource, Tonnerre et Avallon. C’est une route bourguignonne par excellence, qui longe vignobles, combes et collines, avec, comme point d’orgue, la traversée d’une partie du Morvan. Et là, finies les sèches ondulations calcaires de l’Aube ou de l’Yonne… Et nous voici, peu après Avallon, à rouler au cœur de vallons humides et verts, jusqu’au lac de Pannecière, plus grande étendue d’eau de Bourgogne, posé au beau milieu du Parc naturel régional du Morvan. Formée par l’addition de plusieurs chemins départementaux, cette chaussée historique ne répond pas à un besoin impérieux de liaison interurbaine mais relie toute une kyrielle de petites cités au charme diffus qui plaisent tant au voyageur des chemins anciens. Nous voici tout à fait sur ce que j’appelle une «route de plaisir» et comme la tendance est aux grandes vacances en France…

La R.N.444 historique après Avallon en direction de Lormes (photo: Marc Verney, mai 2021). En cliquant sur l'image vous revenez à l'index général.

La route nationale 444 historique naît au carrefour des Maisons-Blanches à Buchères, au sud de Troyes. Là, notre chemin s’éloigne de l’ancienne R.N.71 qui pique vers Fouchères en suivant les traces du canal de la Haute-Seine, inachevé en direction de Bar-sur-Seine. La «route de Troyes à Chaource», déjà dessinée sur la carte de Cassini (XVIIIe) contourne le château de Villebertin, croise la Mogne au hameau de Roche et se perd un peu au milieu des vastes champs jusqu’au village des Bordes-Aumont. On trouve, dans un ouvrage évoquant les archives du département de l’Aube, la trace (fin XVIIIe siècle), de lettres du duc d'Aumont à l'intendant «pour le prier de faire travailler à ce chemin et d'y faire passer (à Chaource?) la route projetée de Troyes à Tonnerre». On y voit aussi l'existence -à la même époque- de documents sur la passage de la Mogne: «Devis d'un pont de pierre, au hameau de Roche, plan, coupe, élévation de ce pont; affiches annonçant l'adjudication par devant le subdélégué»... On y trouve également la trace d'une «lettre de l'ingénieur Coluel à l'intendant concernant le projet d'un nouveau tracé entre Isle-Aumont et les Bordes». Mais rien n’établit une date de réalisation avec précision… C’est en lisant la page Wikipédia consacrée au bourg de Chaource que l’on note la date de 1845 pour la «construction de la route Troyes-Tonnerre avec modification du tracé aux abords de Chaource» alors que dès 1780, découvre-t-on dans l’Histoire de Troyes et de la Champagne méridionale, «les habitants de Chaource demandent au roi la création d'une route de Troyes à Tonnerre par la forêt d'Aumont». Juste avant d’entrer dans la forêt d’Aumont, on remarque, à la lisière de celle-ci, sur la carte d’état-major du XIXe siècle, la mention d’une «auberge» au lieu-dit la Belle-Etoile.

R.N.71: LA SEINE SUR UN PLATEAU
Au fil de la Seine, une belle promenade qui nous fait emprunter le trajet de la N71 historique entre Troyes et Dijon. On vous le dit: une sacrée mise au vert... (lire)

Sortie du village de Roche (photo: Marc Verney, mai 2021).
Plaque de cocher à Chaource (photo: Marc Verney, mai 2021).
Après Cussangy (photo: Marc Verney, mai 2021).

Notre R.N.444 historique (D444) entre dans Chaource par la route de Troyes. Ce village est connu pour son fromage crémeux -exclusivement fabriqué avec du lait de vache entier- et dont l’origine remonte au XIVe siècle. Le village est plus ancien encore et puise ses origines, dans le don, par Charles le Chauve, de sa villa de Cadusia à son fidèle compagnon Robert, «c’est-à-dire la châtellenie de Chaource, avec tout ce qui en dépendait, esclaves, bois, prés, pâturages, eaux et cours d’eau»... lit-on sur le site chaource.fr. «Bâti sur un marais asséché, le village possède, dès 854, une église en torchis et en chaume», raconte encore le site municipal. En 1844, on lit dans le Dictionnaire géographique, historique, administratif, industriel et commercial de toutes les communes de la France que «Chaource est une petite villa mal bâtie, qui était autrefois entourée de murailles crénelées, environnées de fossés remplis d'eau vive. Elle est située près de l'abondante source de l'Armance, dont les eaux font mouvoir plusieurs moulins, et possède trois belles fontaines publiques alimentées par des sources d'eau excellente». Mais ce «vieux Chaource» ne résistera pas aux explosifs allemands, Le 14 juin 1940 dans la soirée, une vague de douze à quinze Stukas pique sur le village et lâche ses bombes; «un épouvantable spectacle s’offre aux yeux des survivants terrorisés, raconte chaource.fr: maisons éventrées ou en flammes, gravats obstruant la chaussée. L’église a terriblement souffert, murs lézardés, toiture béante, de magnifiques vitraux du XVIe siècle sont pulvérisés»... On sort du village –beaucoup plus paisible de nos jours- par le faubourg bien nommé de la Rue-d’en-haut pour continuer vers Cussangy. De vastes étendues cultivées et quelques bois se succèdent.

Notre route entre dans l'Yonne, région de Bourgogne-Franche-Comté (photo: Marc Verney, mai 2021).
Voilà l'authentique cité de Tonnerre qui s'annonce (photo: Marc Verney, mai 2021).

On passe Vallières-Bas et sa Grand-Rue, puis le bois des Murats et nous voici à Prusy. A trois kilomètres plus loin, nous sommes à Coussegrey, dernier village de l’Aube avant le passage dans l’Yonne. Peu avant Tonnerre, la route (D944) traverse le vignoble d’Epineuil, qui fait face à la vallée de l’Armançon. Ici, les abbayes de Saint-Michel et de Quincy produisaient des vins réputés depuis le haut Moyen-Âge, signale vins-bourgogne.fr. «Sous le règne de Louis XVIII, Épineuil compte encore 362 ha de vignes, avant le déclin dû au phylloxera», précise ce site. La production renaîtra dans les années 1990. Aux portes de Tonnerre, la R.N.444 historique se fond un temps dans l’ancienne «route blanche» (R.N.5 devenue D905) de Paris à la Suisse le temps de franchir le canal de Bourgogne et les bras de l’Armançon sur trois ponts supportant l’avenue Aristide-Briand. L’un d’entre eux a été rénové en 2018, lit-on dans le journal l’Yonne républicaine, qui apporte quelques précisions concernant son histoire: «Le pont apparaît sur les plans de la ville d'avant 1650. "Il avait quatre arches, note Géraldine Colas, technicienne en ouvrages d'art. Puis il apparaît avec six arches à partir de 1780"». Aujourd’hui, la cité de Tonnerre se love au pied des collines. Ce n’était pas le cas lors de sa création, dit le site tonnerre-patrimoine.com: «Une cité primitive prend naissance sur le plateau du Montbellant vers le Ve siècle avant notre ère puis se déploie, s’amplifie et se fortifie au cours des siècles. Au Moyen Age, on ne parle pas de la ville de Tonnerre mais des villes de Tonnerre: il y a le bourg principal sur le Montbellant, la ville basse en bordure de rivière (l’équivalent de notre centre-ville actuel) et la ville de Saint-Michel autour de l’abbaye du même nom». Cette époque est marquée par la figure de Marguerite de Bourgogne. Lorsqu'elle se retire dans la ville, Marguerite, femme pieuse et veuve de Charles d’Anjou, fonde l'Hôtel-Dieu, un hôpital aux lignes majestueuses. Les guerres des XIVe et XVe siècles furent désastreuses pour Tonnerre: le comte Louis de Châlon choisit le parti du duc d'Orléans: en 1414, l'armée bourguignonne ravage et incendie la ville haute. Au XVe siècle, une grande pauvreté sévît dans la cité. Tonnerre est tiraillée entre Paris, la Bourgogne, la Champagne... En 1556, un grave incendie ravage les deux tiers de la ville. Après l’inauguration du canal de Bourgogne en 1832, la grande évolution pour Tonnerre est l'arrivée du chemin de fer, le tronçon Paris-Tonnerre est inauguré le 12 août 1849. On quitte cette vraie «petite cité de caractère» par la rue Vaucorbe et la route d'Auxerre (D944A) qui grimpent sur le plateau dominant les toits de la ville. Là aussi, nous ne sommes pas sur le chemin de la R.N.444 historique mais sur celui de l’ancienne R.N.65.

R.N.5: LA SUISSE PAR MONTS ET PAR VAUX
La N5 Paris-Genève-St-Gingolph va quasiment disparaître à la suite du vaste déclassement des routes nationales en 2006... On aborde ici le tronçon Saint-Florentin-Tonnerre. (lire)

R.N.65: TONNERRE SUR LOIRE
Entre Bonny-sur-Loire et Neufchâteau, la route n°65 de 1959 relie Auxerre, Chablis, Tonnerre, Châtillon et Chaumont... une voie de caractère! (lire)

Un virage délaissé peu après Tonnerre (photo: Marc Verney, mai 2021).

Le tracé de la sortie de Tonnerre vers Yrouerre est tout autre sur la carte de Cassini (XVIIIe). La voie ancienne suit la rue Saint-Michel puis le faubourg du même nom quasiment en ligne droite jusqu’au ruisseau de Valru. Visible sur la carte d’état-major du XIXe siècle publiée par le Géoportail de l’IGN, le tracé contemporain suit le petit ruisseau déjà cité depuis l’amont de la ferme de Valru. A notre droite se trouvent ici les rails étincelants du TGV Paris-Lyon, réalisé à la fin du XXe siècle. Après être passé sous le chemin de fer, nous abordons maintenant Yrouerre, vite traversée par les rues de Montperoux, de l’Orangerie et du Faubourg-Saint-Roch. Reste du château du village, un bâtiment, l’Orangerie, devenu aujourd’hui la mairie. Au sud d’Yrouerre, nous abordons un important carrefour. A gauche, la D86 file sur Noyers et l’Isle-sur-Serein. C’est la route originale pour atteindre Avallon. En 1813, le Bulletin des lois de l'Empire français indique que la route départementale n°6 de l'Yonne, entre Tonnerre et Avallon, passe par «Noyers et l'Isle». Quant au financement du chantier et l'entretien de la voie, il est écrit «qu'à partir de 1813 et pendant vingt ans», il sera perçu annuellement «par voie de centimes additionnels» une somme de 9600 francs «sur l'arrondissement de Tonnerre» et de 4000 francs «sur l'arrondissement d'Avallon». La fin du Premier empire a-t-elle gelé ce projet? D’autres avis ont-ils été pris en compte? Ce que l’on sait, c’est qu’en 1877, l'Itinéraire général de la France d'Adolphe Joanne évoque deux voies possibles à partir du carrefour au sud d’Yrouerre, celle «par Nitry», longue de 46 kilomètres et celle «par Noyers», qui s'étend sur 49 km. La R.N.444 des années trente suivra le chemin par Nitry.

Le pont de pierre sur le Serein (photo: Marc Verney, mai 2021).
Gros plan sur la plaque de cocher de Nitry (photo: Marc Verney, mai 2021).

Après avoir traversé de vastes paysages agricoles, la chaussée passe le Serein -peu avant Sainte-Vertu- sur un pont de pierre «du XVIIIe siècle, à trois arches inégales et tablier bombé, bordé par un parapet en pierre», précise le site tourisme-serein.fr. Juste avant Nitry, la voie Tonnerre-Avallon croise l’ancienne R.N.456 (D956), la route d'Auxerre à Montbard. Ici, au-delà de Nitry, c’est «l’autoroute du Soleil» qui est en vedette. Ses premiers tronçons, hors région parisienne, sont construits entre Auxerre-Sud et Nitry en 1963 et entre Nitry et Avallon en 1964. Passé l’échangeur, nous roulons en direction de Joux-la-Ville. Depuis cet ancien village, cité en 1104 sous le nom de Jugae ou Jugum (Wikipédia), on atteint l’ancienne route de Paris à Lyon par le lieu-dit du Puits-d’Edme. Le tracé de celle-ci a été très discuté autour d’Avallon, dont la municipalité a longtemps refusé le passage… Du coup, notre R.N.444 historique réutilise une partie de la vieille route royale du XVIIIe siècle par Lucy-le-Bois mais aussi l’embranchement Vassy-Avallon que le maire de cette dernière ville, voyant ce qu’il perdait en trafic, avait néanmoins obtenu en 1765. On entre dans Avallon par l’avenue du Général-Leclerc et le faubourg Saint-Nicolas. «Avallon, raconte le site plusbeauxdetours.com, tire son nom du gaulois Aballo (pomme) qui devient au Xe siècle Avallonem Castrum. Dominant plusieurs vallées, la ville joue un rôle militaire important durant plusieurs siècles. Les premières fortifications de cet éperon rocheux datent des IXe et Xe siècles. Successivement sous la dépendance des rois de France, du royaume d'Austrasie et des ducs de Bourgogne, la cité a été souvent brûlée, pillée et ses habitants massacrés ou décimés par les épidémies de peste». Et, en descendant aux bords de la petite rivière, qui coule au pied du bourg, «les faubourgs de Cousin-le-Pont, Cousin-la-Roche, rappellent ces industries "hydrauliques" (moulins, tanneries), aujourd'hui révolues, qui ont assuré la prospérité de la ville au XIXe siècle», signale le site patrimoinedumorvan.org.

Longue perspective sur l'ancienne R.N.444, juste avant Avallon (photo: Marc Verney, mai 2021).
Plaque de cocher à Avallon (photo: Marc Verney, mai 2021).

R.N.6, LA ROUTE DES ALPES
Auxerre, Saulieu, Chalon, Mâcon, Lyon... suivez le jeu de piste de la N6 historique (1959) jusqu'en haut du col du Mont-Cenis. Ca décoiffe de visiter les belles routes des Alpes... (lire)

Au sortir d’Avallon, l’ancienne route de Lormes recoupait plus ou moins précisément un tracé antique. On quittait la ville par Cousin-le-Pont et les Petites-Châtelaines sur une chaussée actuellement recouverte par la D127 (et cela jusqu’aux Grandes-Châtelaines). Puis, on voit, dans l’article de Pierre Nouvel, «Les voies antiques de l'avallonnais, apports de l'histoire et de l'archéologie», que la route, visible sur la carte d’état-major du XIXe publiée par l’IGN, traverse les bois (Hâte de Maucrot, du Vault et de Chastellux) pour se fondre un temps dans la D944 après les Rompées. S’extirpant vers la gauche de l’ancienne R.N.444, la voie antique restait en hauteur jusqu’au lieu-dit le Pont, face à la Cure, franchie sur un ouvrage situé au pied de Chastellux. Suivant la route de la Chaume, le chemin évitait la Rue-Perrin pour prendre la direction de la Rue-de-la-Croix et de la Bascule pour s’imbriquer à peu près fidèlement sous le bitume de la D944 jusqu’à Lormes. La R.N.444 des années cinquante, sort, elle, d’Avallon par Cousin-la-Roche et passe le Cousin sur le pont Claireau, bâti au cours du XIXe siècle. On voit dans l’Annale des ponts et chaussées de 1869 l’annonce du décret du 27 septembre 1868 portant sur la rectification de la route départementale n°7 «entre Avallon et le ponceau des Rompées», ce qui pourrait correspondre à la réalisation du chemin actuel. Plus tard, en août 1873, paraîtra un décret portant sur «des travaux de rectification et d’élargissement de la RD7 dans la traverse de Cousin-la-Roche». A Chastellux, il faut franchir la Cure. Un viaduc, bâti en amont du vieux pont (XVIe), lit-on dans l'ouvrage Mémoire et compte rendu des travaux de la société des ingénieurs civils, y a été construit de 1876 à 1878 pour l'amélioration de la route, qui présentait ici «des pentes de 8 à 12%». «On devait établir un pont biais à deux arches de 20 mètres d'ouverture mais on ne trouva pas d'entrepreneur pour l'adjudication. M. Prevost, ancien conducteur des ponts et chaussées et fabricant de ciment à Avallon, proposa de remplacer le pont projeté par un viaduc de onze arches et de 20 mètres de hauteur maximum en petits matériaux avec mortier de ciment de Vassy. Cette proposition fut acceptée et M. Prevost fut chargé de l'exécution», explique encore cette note, rédigée par M. Lavoinne, ingénieur en chef des ponts et chaussées.

Le château de Chastellux vu depuis la chaussée de la R.N.444 historique (photo: Marc Verney, mai 2021).
Plaque touristique du château de Vésigneux (photo: Marc Verney, mai 2021).

A l’Huis-Raquin, la route n°444 historique longe le lac et le barrage du Crescent. «Initiative de la Compagnie hydroélectrique de la Cure et propriété de la Ville de Paris jusqu'en 1946, le barrage a été construit entre 1929 et 1932 afin de réguler les eaux de l'Yonne et de la Seine et ainsi éviter les crues à Paris, en produisant également de l'électricité», raconte le site patrimoinedumorvan.org. Après la Bascule et le bois Milot, nous passons aux abords du château de Vésigneux. Cette forteresse féodale date du XIVe siècle et fut remaniée aux XVIe et XVIIe siècles. L'ensemble fut dévasté par les Grandes Compagnies et les Anglais pendant la Guerre de Cent ans, précise patrimoinedumorvan.org. Le puissant donjon carré reste de l'époque médiévale (pop.culture.gouv.fr). La «route de Lormes à Avallon» passe ensuite aux abords du village de Saint-Martin-du-Puy (Nièvre). A Rincieux, on constate que la route a été rectifiée. L’ancien chemin emprunte la «route de Jourland», passe ce lieu-dit et se refond dans la D944 actuelle au Grand-Pré alors que la chaussée actuelle est tracée un peu plus à l’ouest, vers les Granges. Puis, le bois des Grands-Vernets traversé, la R.N.444 historique arrive à Lormes par la «route d’Avallon». Le bourg, écrit le Guide Bleu Bourgogne-Lyonnais, est mentionné pour la première fois «dans une charte de 1125. L’acte d’affranchissement des habitants est de 1223 et les fortifications de la ville furent aussitôt commencées. Des vingt-deux tours de l’enceinte, aucune ne subsiste». La D944 quitte la petite cité par l’avenue du Huit-Mai et côtoie l’étang du Goulot avant de mettre le cap sur Vauclaix. Autour de Planvoy, notre périple croise le «tacot du Morvan», les vestiges d’une ancienne petite ligne de chemin de fer à voie étroite qui reliait Saulieu à Corbigny en passant par Ouroux et Lormes. Mise en service en 1901, la ligne de ce petit train sera fermée en 1939, victime de la concurrence des autocars.

R.N.77bis: LA TRAVERSEE DU MORVAN
La RN77bis de 1959 relie Nevers à Sombernon en passant par le Morvan. Une route de jolies courbes à suivre ici (lire)

Le carrefour de Vauclaix. Notre route y croise l'ancienne R.N.77 bis (photo: Marc Verney, mai 2021).
La rigole d'Yonne approvisionne en eau le canal du Nivernais (photo: Marc Verney, mai 2021).

Plus loin, la «route de Château-Chinon» virevolte dans un environnement vallonné et plaisant jusqu’à Vauclaix. «Le nom du village, écrit Wikipédia, vient du latin Vallis Clausa (vallée encaissée) en raison du rétrécissement de la vallée de l'Anguison en cet endroit. La paroisse fut fondée au VIIIe siècle par les moines de Corbigny». Au lieu-dit du «Carrefour de Vauclaix», la R.N.444 historique croise la R.N.77 bis historique, dite «de Nevers à Dijon». Le réseau routier du Morvan, à peu près inexistant au début du XIXe siècle, doit beaucoup au député de la Nièvre, André-Marie Dupin (1783-1865), qui interviendra inlassablement, à l’Assemblée nationale, en faveur de sa région d’origine. A quelques pas du carrefour, en direction de Château-Chinon, le site patrimoinedumorvan.org mentionne un pont des années 1830, qui enjambe l'Anguison. En 1871, Victor Petit, dans sa Description des villes et campagne du département de l'Yonne, évoque la voirie locale de l’époque (au delà de sa région fétiche, donc): après le carrefour de Vauclaix, «notre route continue vers le sud, monte et descend sans cesse, arrive au hameau de Chassy, où elle traverse l'Yonne». Puis voici l’Huis-Picard. Le terme «huis» est typique du massif du Morvan. Donné à de tous petits hameaux, il évoque souvent le repeuplement de la région après la guerre de Cent ans dans des clairières artificielles. Le mot «huis» est le plus souvent suivi du nom de la personne ayant procédé au défrichage des lieux. A gauche, voilà maintenant le lac (réservoir) de Pannecières. Son barrage a été mis en service en 1949. Géré par l’établissement public territorial de bassin (EPTB) Seine Grands Lacs, il régule le cours de l’Yonne, l’un des principaux affluents de la Seine. «En hiver et au printemps, les eaux sont stockées dans le lac-réservoir, en été et en automne, l’eau précédemment stockée dans le lac-réservoir est restituée à la rivière pour lui éviter un débit trop faible», lit-on sur le site seinegrandslacs.fr. C’est aussi un «spot» touristique majeur, vaste de 520 ha, «il se répand sur 7,5 km dans un joli site de collines boisées. Plus sauvage que le lac des Settons, il est le paradis des pêcheurs et des randonneurs», raconte le site nievre-tourisme.com. On notera qu’en 1828, l’ordonnance royale du 23 juillet décidait que le chemin départemental n°12 entre Clamecy et Château-Chinon devait passer à Lormes, Vauclaix, et Enfert. Sur ce tracé, on remarque le hameau du Pont-de-Pannecières, où l’on trouve un ouvrage à trois arches en pierre sur l’Yonne. Ce pont, vraisemblablement bâti au début du XIXe siècle, dit patrimoinedumorvan.org, (qui cite la «mémoire locale»), était «situé sur un chemin important rejoignant Lormes». Le tracé actuel est certainement l’œuvre d’André-Marie Dupin.

Le beau lac de Pannecière (photo: Marc Verney, mai 2021).
Derniers kilomètres avant Château-Chinon... et c'est toujours aussi vert (photo: Marc Verney, mai 2021).

Il ne reste que quelques kilomètres avant Château-Chinon, terme de ce voyage. Le bitume s’exalte entre bois et vallons; pas une maison à l’horizon avant d’aborder cette petite cité perchée par la «route de Lormes». Originalité: le bourg est composée de deux communes créées après la Révolution française: Château-Chinon (Ville) et Château-Chinon (Campagne)... Cette différence, par rapport à d'autres cités, tient, nous dit René-Pierre Signé sur le site ville-chateau-chinon.fr, à «la crainte des habitants de la ville de perdre les privilèges qu’ils avaient acquis en matière de fiscalité et de droit en élargissant le périmètre de la ville, englobant ainsi les hameaux qui l’entouraient. Château-Chinon intra-muros, par prudence, voulu conserver ses acquis»…. Ce même site municipal nous dit que le document le plus ancien qui mentionne «la ville et son prieuré Saint-Christophe dépendant des bénédictins de Cluny, date de 1076. Château-Chinon appartint longtemps au diocèse d’Autun, même si le Nivernais fut détaché de la Bourgogne dès le VIe siècle». Oppidum gaulois, forteresse romaine, puis place fortifiée, Château-Chinon fut, au fil des siècles, la propriété de la Maison de Bourgogne, de celle d’Autriche mais aussi des grandes familles du royaume de France... Au XXe siècle, les années 1950 marquent l'arrivée dans le Morvan d'un homme politique d'origine charentaise, François Mitterrand, qui devient maire de la ville de 1959 à 1981. On connaît la suite, l’homme fut le premier président socialiste de la Ve République… Au carrefour final, la R.N.444 historique rejoint la route de Saint-Laurent-en-Grandvaux (Jura) à Nevers. Et là, d’autres horizons s’offrent à nous…

R.N.78: LE JURA PAR LE MORVAN
La RN78 de 1959 relie Nevers à St-Laurent en Grandvaux en passant par le Morvan, les beaux vignobles de Bourgogne et Lons. Une route pleine d'histoires à suivre ici (lire)

Marc Verney, Sur ma route, mai 2022
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