Documentation utilisée: Atlas des grandes routes de France (Michelin, 1959); carte n°61, Paris-Chaumont (Michelin, 1941); carte n°94, Environs de Paris (Michelin, 1947); carte n°97, 150 km autour de Paris (Michelin, 1970); carte n°100, Sorties de Paris (Michelin, 1965); carte n°109, Paris-Compiègne (IGN, 2011); Archéologie aérienne en Ile-de-France, Beauce, Brie, Champagne, Daniel Jalmain, Technip (1970); Chelles, histoire de ses quartiers et de ses rues, Christian Gamblin, Société archéologique et historique de Chelles (1994-1995); Crécy et ses villages, Yves Richard, Presses du Village (1997); Crécy-en-Brie et ses environs, René-Charles Planck, éd. Amatteis (1989); Coulommiers et son canton, Daniel Kramer, éd. Alan Sutton (2009); Coulommiers et ses environs, Yves Richard, éd. Amatteis (1992); Etudes sur la rivière et la vallée du Grand-Morin, A. Bazin, impr. Paul Brodard (1907); Guide Bleu des environs de Paris (Hachette, 1928); Histoire des routes de France, du Moyen Age à la Révolution, Georges Reverdy, Presses de l’ENPC (1997); Jules Favre et le comte de Bismarck: entrevue de Ferrières: documents officiels, Georges d'Heylli, Librairie générale (1870); La Ferté-Gaucher et ses environs à la Belle Epoque, René-Charles Plancke, éd. Amatteis (1993); Les étapes d'un touriste en France: promenades et excursions dans les environs de Paris. Région de l'Est, Alexis Martin, éd. A. Hennuyer (1898-1900); Les rues de Lagny-sur-Marne, musée municipal Gatien-Bonnet (1995); Mémoires du pays de Lagny, Pierre Herbin, éd. de la Gourdine (1976); Notice historique sur Nogent-sur-Marne, par le Mis de Perreuse (impr. de J.B. Gros, 1854); Paris et ses environs, Sélection du Reader’s Digest (1971); Promenades à travers la vallée du Grand-Morin, Georges Husson, 1893, rééd. éd. Amatteis (1983); Voyage autour du viaduc de Nogent-sur-Marne, Henri Escoffier (C. Marpon et E. Flammarion, 1889); chelles.fr; chessy77.fr; france-air-otan.blogspot.fr; mairiedeneuillysurmarne.com; ville-nogentsurmarne.fr; vincennes.fr; Wikipédia, Wikisara. Remerciements: BPI du centre Georges-Pompidou, le Géoportail IGN, Gallica. Dans les rues de Coulommiers:
Localités traversées par la R.N.34 de 1959:
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Belles
routes de France
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La route nationale 34 prend sa naissance à la porte de Vincennes, un lieu vibrionnant d’activité, où la civilisation de l’automobile n’est pas un vain mot. De là, nous raconte le Guide Bleu des environs de Paris 1928, la chaussée se dirige tout d'abord vers Vincennes: «sortant de Paris par le cours et la porte de Vincennes, on suit tout droit l'avenue de Paris, pavée, qui longe à droite Saint-Mandé». L’avenue de Paris (auj. D120), tracée par Louis Le Vau en 1660, garde de sa naissance sa grande largeur. On trouvait encore, en ces lieux, au début du XXIe siècle, quelques anciennes signalisations Michelin, notamment sur le pourtour du bois de Vincennes. La cité de Vincennes, nous dit le guide, «est par elle-même sans intérêt, mais son château et son bois attirent beaucoup de visiteurs». Plus loin on peut lire que «l'avenue de Paris sépare la ville, au nord, du château et du fort de Vincennes, au sud». Le donjon massif aux murs de trois mètres d'épaisseur est particulièrement spectaculaire. Sur le site de la mairie de Vincennes, on évoque le lieu-dit de «La Pissotte, dont le nom évoque un ruisseau, attesté dès la première moitié du XIe siècle: des maisons établies le long d'une ancienne voie romaine», qui «constituent un hameau situé sur le territoire de la seigneurie de Montreuil». Cette voie, dont, nous dit le site internet du château de Vincennes, «le tracé est occupé par l'actuelle rue de Fontenay à Vincennes», allait en direction de Chelles et Lagny. C’est d’ailleurs sans doute grâce à la foire de Lagny, l'une des quatre grandes foires de Champagne apparues au XIIe siècle que cet axe routier a pu se maintenir, voire se développer au Moyen Age. Acquis au IXe siècle par les rois de France, le bois de Vincennes devient un terrain de chasse pour les monarques. Dans la foulée, un premier château est élevé et c'est tant Philippe-Auguste (qui clôt en 1183 la forêt d'un mur) que Saint-Louis (bâtisseur d'une première Sainte-Chapelle qui accueille une épine de la couronne du Christ) qui y passent d'agréables moments… A VOIR, A FAIRE
Juste après Vincennes, la R.N.34 s'enfonce dans le bois pour rejoindre Nogent-sur-Marne. La route laisse, à droite, partir une chaussée vers Joinville-le-Pont (la R.N.303 en 1941, la R.N.4A en 1965). Dans l’ouvrage Voyage autour du viaduc de Nogent-sur-Marne, l’auteur raconte: «Avant les transformations exécutées d’après les plans et sous la direction de M. Alphand (NDLR: à partir de 1853) point de chemins ni de sentiers; seule la route nationale traversait cette forêt, se dirigeant du fort vers Nogent et de laquelle se détache, à deux ou trois cents mètres, la route départementale descendant vers Joinville et desservant la Brie». Plus loin, Nogent-sur-Marne s’étage sur le versant sud du plateau de Romainville. Il y eut, dès le VIIe siècle, des habitations royales. Puis, au XVIIe siècle, alors que la population reste encore essentiellement rurale, de riches bourgeois s’installent, profitant de la campagne. «En 1788, lit-on dans la Notice historique sur Nogent-sur-Marne, le gouvernement fit tracer la nouvelle route d’Allemagne par Lagny. Auparavant, il existait une vieille route dont il reste encore la trace et qui porte le nom d’ancien chemin de Lagny. La nouvelle route fut placée à la gauche de celle-ci, dans la traversée de la commune». Cette même Notice indique qu’il n’y a pas, «jusqu’en 1834» de transports publics pour Nogent… La construction de la ligne de chemin de fer Paris-Mulhouse et d’un long viaduc (en 1854) dominant la Marne va profondément changer les lieux. L’urbanisation devient galopante; on parle même de «marée pavillonnaire»… Une forte immigration italienne s’installe… Enfin, c’est à Nogent-sur-Marne, les 14 et 15 mai 1912, que la police attaque en force le repaire de deux membres de la «bande à Bonnot», les «inventeurs» du hold-up motorisé! Au rond-point de Plaisance (du Maréchal-Leclerc en 1965), la R.N.34 laisse partir vers le nord la R.N.186, route nationale qui a la particularité de tourner en rond autour de la capitale (l’autoroute A86 joue, de nos jours, ce rôle). Puis elle traverse la partie nord du Perreux sous le nom de boulevard d'Alsace-Lorraine. La ville est née en 1887, après une scission avec Nogent-sur-Marne. Là, au lieu-dit la Maltournée se trouvait l’usine des Chemins de fer nogentais; les tramways de cette société ont longtemps fonctionné à l’air comprimé.
Nous arrivons maintenant à Neuilly-sur-Marne. On pense qu’il y avait un gué, utilisé à l’époque gauloise. La première mention d’un site habité remonte ici, nous précise le site de la ville, à 998; il s’agirait d’une villa, le nom donné à une grande propriété exploitant la terre au profit d’un seigneur. Il faut noter qu’à cette époque, la forêt de Bondy s’étendait jusqu’à la Marne. Des vignes sont plantées au XVIIIe siècle. Toujours selon le site municipal, la route d’Allemagne qui passe par Nogent et Neuilly-sur- Marne est ouverte ici en 1782. Elle a, à peu près, le tracé de la R.N. 34 historique. Au début du XXe siècle, les lotissements se multiplient le long de la route nationale: l’Épi d'or, le Pré fleuri, les Verdoyants… Rien n’arrête les promoteurs dans leurs tentatives pour «survendre» ces lieux… Les voyageurs, au XVIIIe siècle, pouvaient se restaurer aux hôtelleries du Grand Cerf et du Cheval Blanc. Reprenons maintenant notre Guide Bleu de 1928: «A Neuilly, se termine le canal de Chelles, long d'environ 9 km, creusé pour suppléer à la navigation de la Marne qu'il double sur la rive droite depuis Vaires en amont». Encore un peu plus loin, indique le Guide Bleu 1928, «la route passe entre les asiles d'aliénés de Ville-Evrard (1868) et de Maison-Blanche (1900), qui appartiennent à la ville de Paris». Peu après, on entre en Seine-et-Marne. La route porte désormais le numéro départemental 934. Plus singulière est la description de la bourgade suivante: Chelles. C’est là, nous dit le site de la municipalité, qu’à l’aube du VIe siècle, séjourne Clovis, roi des Francs. Plus tard, durant l’époque mérovingienne, raconte encore la municipalité, «les souverains séjournent fréquemment à Chelles, à tel point que certains la considèrent comme la "capitale" de la France». Autres temps, autres mœurs…Dans son ouvrage Les étapes d'un touriste en France, Alexis Martin explique que «ce village dont les Parisiens du début du XIXe siècle se souciaient peu, est maintenant très visité; le dimanche, les cafés et les restaurants qui avoisinent la gare, envahis par de joyeuses caravanes, font d’excellentes affaires»… En 1928, la construction du vaste triage ferroviaire de Vaires, au sud, va encore plus bouleverser Chelles. C’est aussi de là que part la nouvelle voie du TGV-Est au XXIe siècle.
La route royale est pavée en à Chelles en 1787. Le tracé de cette ancienne voie, vite dépavée en 1800, «était, nous précise le livre Chelles, histoire de ses quartiers et de ses rues, légèrement différent du tracé de la nationale 34: il passait à l’est de l’emplacement de la gare alors que le nouveau tracé passe à l’ouest de cette même gare»… Nouvelle modification en 1960: la R.N.34 n’emprunte plus les avenues du Maréchal-Foch et de la Résistance puis les rues Louis-Eterlet, Gambetta et Jean-Jaurès mais un contournement par l’avenue du Général-de-Gaulle jusqu’à l’ancienne avenue de la République que l’on a rebaptisé avenue du Gendarme-Castermant… Au 19e kilomètre de notre promenade, voilà la première mention de verdure... «La route, est-il écrit dans le Guide Bleu 1928, passe entre les bois de Brou, à gauche, et les bois de Vaires, à droite». C’est un petit peu plus compliqué en 2013… Brou-sur-Chantereine, dont on a les premières traces au XIIIe siècle, est éclaté en trois hameaux: celui de Brou, le plus ancien, situé dans le nord de la commune; le hameau de La Villeneuve-aux-Anes, au sud de la route Chelles-Lagny, qui abrite un prieuré fondé au XIIIe siècle et enfin le hameau de La Forest, au nord du château. A VOIR, A FAIREAu sud de Brou-sur-Chantereine, voici Noisiel (on peut y accéder par la D34A). Là se trouve la chocolaterie Menier, où, au milieu du XIXe siècle des milliers d’ouvriers produisaient jusqu’à 70 tonnes de chocolat par jour… Un bel exemple d’architecture indstrielle. Après le village de Pomponne, voici, au 24e kilomètre, la ville de Lagny-sur-Marne. Pour sauter les voies du chemin de fer au niveau de la station de Lagny-Thorigny et passer de l’autre côté de la Marne, il faut tout d’abord emprunter un drôle de pont en X, réalisé en 1935. La petite cité, «en amphithéâtre sur la rive gauche de la Marne», nous dit le Guide Bleu 1928 a longtemps été le premier point de passage de la Marne après Paris. «Il y avait là un gué, explique l’ouvrage Mémoires du pays de Lagny, placé dans l’axe de la côte de la Madeleine et de la côte Saint-Laurent». Plus tard, l’existence d’un pont à cet emplacement est attestée au XIIe siècle. Mais l’ouvrage (le pont Maunoury aujourd’hui), totalement ou partiellement en bois jusqu’au milieu du XIXe siècle, sera bien souvent victime des guerres et des intempéries.
Afin de désengorger le centre-ville, on bâtit un nouveau pont, en pierre, qui sera inauguré en 1850 (lui aussi pas mal amoché par les guerres!). C’est le pont Joffre actuel qui s’ouvre sur la rue Gambetta (rue du Pont-Neuf à l’époque), qui sera ouverte pour l’occasion. Elle aboutit vers la rue Saint-Denis, qui, à l’époque, permettait la traversée de Lagny. A l’Est, nous explique l’ouvrage Les rues de Lagny-sur-Marne, la sortie de la cité se fait par l’avenue George-Clemenceau, l’ancienne ruelle de la Grosse-Pierre, «redressée quelques années avant la Révolution». A noter, non loin, un chemin de la Grande-Voirie, qui se raccroche à la rue Saint-Denis par la rue du Chariot-d’Or et qui pourrait bien avoir été l’antique entrée dans la ville, côté Est. En 1935, un plan de déviation autour de Lagny sera lancé, mais interrompu par la guerre. Il sera mené en trois parties, entre 1971 et 1979… mais nous sommes là, quasiment dans l’époque contemporaine… A VOIR, A FAIRELa petite cité de Lagny se parcourt aisément à pied. Détruite par les Vikings vers 910, on peut y entrevoir cependant quelques traces de son passé de ville de foire dont l’immeuble des Cinq Pignons, une ancienne halle (partie basse de l’édifice), qui abritait les marchands de la ville d'Ypres. L'automobiliste du début du XXe siècle ne pourra en aucun cas reconnaître la portion suivante. Le paysage de cette région des bords de Marne a été totalement remanié dans le cadre de la construction de l'immense espace de loisirs Disneyland Paris. Le passé y est totalement mort, l'espace privatisé règne en maître, ainsi que le lotissement aux pavillons stéréotypés, dont les murs de béton triste pleurent leurs couleurs déjà délavées. Les loisirs sont, ici, pré-formatés, ouate d'artifices qui camoufle un certain vide... lié à notre mode de vie consumériste, il faut bien l'avouer! Alors, la voiture roule un peu plus... pour dépasser ces contrées peu attractives... Chacun ses goûts!
Après Chessy, village déjà dévié en 1958, et où la route royale était partiellement pavée au XVIIIe siècle, on se retrouve vers Montry. Au cours du XIXe siècle, nous informe Gérard Reverdy dans Les routes de France aux XIXe siècle, «des circulaires invitent préfets et ingénieurs à amener des compagnies industrielles à entreprendre à leurs frais la correction des rampes rapides moyennant péage»… Eh bien, une des premières applications officielles du texte pourrait bien avoir été la rectification de la route n°34 à Montry… Par ailleurs, lors de la guerre franco-prussienne, Jules Favre, alors ministre des Affaires étrangères y rencontre le ministre-président Otto von Bismarck en septembre 1870 avant les durs combats du siège de Paris.
Un km plus loin sur la R.N.34 historique, voilà Couilly, où la route croise la R.N.36 Villers-Cotterêts-Melun. D’après l’ouvrage Etudes sur la rivière et la vallée du Grand-Morin, on sait qu’il y avait là jadis un passage possible sur le Grand-Morin appelé le gué aux Pourceaux. En 1100, nous dit Wikipédia, «Couilly et Saint-Germain-les-Couilly formaient deux paroisses distinctes tout en étant à l'origine qu'un seul et même bourg séparé par un pont sur le Morin». Plus tard, un pont en maçonnerie à quatre arches a été bâti sur la rivière en 1845. «De Couilly à Pont-aux-Dames, la route est un véritable boulevard», annonce en 1893 l’ouvrage Promenades à travers la vallée du Grand-Morin. Au Pont-aux-Dames, village réuni à Couilly en 1930, nous informe l’ouvrage Crécy-en-Brie et ses environs, il y avait là une important abbaye. Celle-ci, détruite à la Révolution française, a hébergé Madame du Barry, en disgrâce après le décès du roi Louis XV. On trouvait aussi dans les parages, nous signale le Guide Bleu des environs de Paris 1928, la Maison des comédiens, la maison de retraite des artistes dramatiques, fondée en 1893 sous la direction du comédien Coquelin.
Après, une nouvelle route, qui évitait la butte de Montbarbin fut réalisée entre 1756 et 1760 (on voit encore l’ancien tracé sur la carte). Ce n’est qu’en 1777, lit-on dans Crécy et ses villages, que la généralité de Paris envisage une «autre» nouvelle route d’Allemagne par Coulommiers, Vitry-le-François et non plus par Meaux. Bientôt s'annonce sur ce chemin la petite localité de Crécy-la-Chapelle (Crécy-en-Brie aussi). Cette cité est affublée, dans les offices du tourisme, du glorieux surnom de «Venise de la Brie»... Car nous précise Crécy-en-Brie et ses environs en 1835, le bourg «est une petite ville très agréablement située dans un beau vallon sur la rive droite du Grand-Morin qui s’y divise en plusieurs bras et partage la ville en trois îlots. On y entre par trois portes et autant de ponts». Sur le brasset circulaire, ces petits ponts supportant le trafic de la R.N.34 ont été reconstruits en 1843-44. La ville fut remarquablement fortifiée dès le XIe siècle: doubles remparts, plusieurs dizaines de tours, larges fossés alimentés par le Grand-Morin… C’est le duc de Penthièvre, voit-on encore dans Crécy-en-Brie et ses environs, qui, «dans la dernière partie du XVIIIe fait réparer et embellir le château, des constructions s’élèvent de tous côtés, les rues élargies et la grande place dégagée» A VOIR, A FAIREL’église collégiale Notre-Dame, érigée à partir du XIIe siècle, de belles promenades sur le tracé des anciennes fortifications, les fossés remplis d’eau. Plus loin, nous dit le Guide Bleu 1928, la «route N34 s'élève sur le plateau puis redescend vers le Grand-Morin en laissant, à droite, Mouroux». On arrive au-dessus de Coulommiers après avoir longé un ancien aérodrome, fondé en 1937 pour les besoins de l'Armée de l'Air française et qui servira de manière assez intense durant la bataille de France en mai et juin 1940. Occupé par les Allemands, l’aérodrome, maintenant équipé d’une piste «en dur» verra s’installer des avions militaires américains de la Libération à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Durant les années cinquante, la base sert, lit-on sur le blog France Air Otan, de terrain de dispersion aux chasseurs de l’Armée de l’air. Voisins s’efface vite: avant 1911, la route de Paris était, remarque-t-on dans Coulommiers et ses environs, bordée de peupliers, et, grâce à la pente (relative!), on y trouvait le café Au repos de la montagne…
On entre dans Coulommiers par l’avenue de Paris, qui franchit le Grand-Morin. La cité, nous précise le Guide Bleu 1928, «se composait, au Xe siècle, de quelques maisons groupées autour d'un château-fort». Le texte le plus ancien évoquant la ville date de 1102. Entre le XIe et le XIIe siècle, les comtes de Champagne s’installent à Coulommiers. Ils apportent une relative prospérité à la ville avec l’implantation de tanneries sur le Grand-Morin. Ce qui a valu à la cité un surnom pas joli, joli de… «pot de chambre» de la Brie! «Prise par Jean sans Peur en 1417, reprise par Charles VII», la ville fut envahie, nous narre l’ouvrage Coulommiers et ses environs, «par les Anglais en 1430. Sous la Fronde, la ville est saccagée par Charles de Lorraine en 1652»… Un peu plus tôt, au début du XVIIe siècle, pour éviter les crues, le Morin est dévié de sa course dans Coulommiers par la Fausse Rivière. C'est un fromage qui fait la renommée internationale du lieu: «Coulommiers, apprend-on dans le Guide Bleu 1928, fait un commerce considérable de fromages de Brie d'une forme et d'une qualité spéciales, dits coulommiers». L’expansion de ce négoce est telle qu’une halle aux fromages a été bâtie, le marché se tenant le dimanche après 1930. Le voyageur trouvait dans la ville, l’Hôtel du Soleil-Levant, vanté par le Touring Club de France, mais détruit en 1921. La traversée de la ville est à peu près la même qu’en 1800, en longeant la Fausse Rivière par le sud. On sort de la ville par la longue avenue de Strasbourg –pavée de grès vers 1909- où se trouvait, au XIXe siècle, le relais de la poste aux chevaux. Et voilà la côte de Montapeine (c’est mignon!) qui permet de sortir définitivement de la ville. A VOIR, A FAIREL’office du tourisme propose des circuits découverte dans la ville. On peut s’intéresser au théâtre, agencé à l’italienne, où Louis de Funès fit ses débuts en 1926 en tant qu’amateur, au parc des Capucins, un des plus beaux d’île-de-France, aux restes de l’imprimerie Brodard (tout le monde connaît les fameuses Bibliothèques Rose et Verte). A voir aussi, des manoirs et demeures au fil des rues, une commanderie des Templiers, construite au XIIe siècle, et qui constitue l’ensemble templier le mieux conservé d’Ile-de-France, la bibliothèque municipale, aménagée dans une ancienne prison du XIXe siècle! Enfin, l'église des Capucins, construite en même temps que le château, abrite aujourd’hui le musée municipal. «En 1790, voit-on dans l’Histoire des routes de France, du Moyen Age à la Révolution, la généralité d’Ile-de-France prévoyait 15 000 livres pour le redressement de la route d’Allemagne par Coulommiers et la Ferté-Gaucher». Arrivés sur le plateau, on entrevoit déjà là les étendues (presque) infinies du pays briard qui s'allongent jusqu'aux portes de l'Est… Pour un peu, la voiture s'ennuierait déjà!! Le voyageur inspiré, nous glisse le Guide Bleu 1928, ferait bien de prendre «l'agréable route qui remonte la vallée du Grand-Morin» (auj. D66, D46). Sur la R.N.34 historique, notre route croise, à Chailly-en-Brie (l’ancienne Calagum), la voie d’Agrippa, un réseau de chemins antiques connus dans la région sous le nom de «Chemin Parré», allant de Lyon à Boulogne (au sud, la D209). Dans l’ouvrage Archéologie aérienne en Ile-de-France, Beauce, Brie, Champagne, on découvre que la photo aérienne, outre de pouvoir suivre les voies romaines, a permis, ici de constater que «les variantes de la route d’Allemagne sont particulièrement visibles».
Nous voilà maintenant au 73e kilomètre de la «nouvelle grande route d’Allemagne par Sézanne», comme indiqué sur la carte d’état-major du début du XIXe siècle. La Ferté-Gaucher se profile à l'horizon. Là, selon le Guide Bleu 1928, «le Grand-Morin y actionne de grands moulins». Ceux-ci manquent désormais à la vue du voyageur de ce XXIe siècle. Le bourg aujourd’hui assoupi autour de ses deux routes principales. Ici, on achève la route Paris-Sézanne aux alentours de 1789. Malgré l’offre généreuse d’une subvention municipale, nous raconte l’ouvrage La Ferté-Gaucher et ses environs à la Belle Epoque, les ingénieurs préfèrent contourner la ville par les vergers –dit les Ruelles- «dans le but d’éviter les inondations». Le voyageur Alexis Martin décrit ainsi le bourg au XIXe siècle: «C’est un pays d’avenant aspect, qui se développe en longueur au-delà de belles plaines, de vergers en plein rapport et de jardins fleuris»… Les lignes droites s'enchaînent. C'est là que la route s'extirpe de l'Ile-de-France. Nous pénétrons dans la Marne. Puis voilà le lieu-dit l’Arbre-Haut, où l’on rejoint la R.N.4. Au km 97, Esternay «au fond d'une cuvette» est le signal de la fin de la RN34 en 1959. Il n'en a pas toujours été ainsi: la N34 se prolonge jusqu'à Vitry-le-François par Sézanne, Fère-Champenoise, Sommesous du XIXe siècle jusqu’en 1949, ce que confirmait encore une ancienne plaque de cocher vue en 2007 à la sortie ouest de Vitry-le-François, sur l'actuelle N4 (en cliquant sur "avant" vous poursuivez en direction de Strasbourg, en cliquant sur "arrière" vous retournez à Vincennes).Marc Verney, Sur ma route, septembre 2013 |